ÉCONOMIE Consommation

Etiquetage nutritionnel : bonnes intentions, message brouillon

Les industriels sont verts de rage, car ils se sont faits avoir comme des bleus. On leur avait promis de la concertation. La FCD, qui a cru pouvoir jouer le syndicat jaune, a avancé ses propositions. Rien à faire, Marisol Touraine tient mordicus à ses codes couleurs sur les produits alimentaires.

Personne ne conteste l'objectif, mais il n'y a de consensus sur les moyens.

Historiquement, l'étiquetage nutritionnel a d'abord été initié pour fournir aux consommateurs des informations relatives à la santé, au "bien mangé", démarches encadrées par des obligations légales dans presque tous les pays. L'explosion du problème de l'obésité a conduit la plupart des parties prenantes (pouvoirs publics, ONG, industriels et distributeurs) à prendre des initiatives dans ce domaine : logo "santé", énergie, calories, infos sur la consommation journalière, etc. Avec un joyeux mélange il est vrai, entre promesse marketing et information indispensable.

Depuis 10 ans, on a multiplié les études pour mettre en évidence les systèmes d'information qui fonctionnent le mieux. C'est à dire simples à utiliser, objectivement informatifs et favorisant une prise de décision judicieuse pour le consommateur. Mais aucune solution ne fait réellement consensus.

Les difficultés d'un système unique, simplifié et codifié

Marisol Touraine propose un affichage simplifié, genre feux tricolores ! Est-ce si simple ?

D'abord, il y a une sorte de contradiction. La loi prétend influencer "dans leur intérêt", le comportement des consommateurs. Pourtant, les nutritionnistes ne cessent de nous répéter qu’on peut manger de tout, à condition  d'être raisonnable et de varier son alimentation.

Si on veut bien ne pas être hypocrite, le système des codes couleurs conduit à désigner les moutons noirs, et sans aller jusqu'à imposer un marketing repoussoir (type paquet de cigarettes), il n'hésite pas à les stigmatiser par la couleur.

Le consommateur se laissera-t-il effrayer par un feu rouge (ou mauve) apposé sur son plat préparé ?

L’enjeu est de taille pour les industriels…qui pestent contre cette proposition : "trop d'info tue l'info", pourquoi ne pas laisser chacun communiquer et à une approche technique et informative, faut-il substituer une solution culpabilisante ?

A question légitime, réponse clientéliste, et je trouve, franchement hypocrite. Les pouvoirs publics proposent que la plupart de nos bons produits du terroir, ambassadeurs de la culture culinaire française,  échappent à la mesure. On sauve ainsi les Cassoulets toulousains et les choucroutes alsaciennes ou le Kouign-amann breton ( tu parles ! 1/3 de beurre, 1/3 de farine, 1/3 de sucre et un dernier tiers de beurre !). Mais ouf ! la FNSEA et les TPE de l'alimentaire ne défileront pas. Où sont alors la cohérence et l’ambition ?

Ensuite, face à la grogne des syndicats industriels, la ministre a expliqué que l’étiquetage ne sera pas obligatoire. Alors là, on ajoute la tartufferie à la confusion.  Effectivement, l’Union européenne interdit de l’imposer (cf. Règlement Inco) !

Oui à une meilleure info, mais copie à revoir

Je n’ai rien contre l’idée évidemment d’informer le mieux possible le consommateur sur la qualité nutritionnelle de sa boîte de conserve ou de son plat préparé. Mais j’ai du mal à être totalement convaincu que ce type d'étiquetage soit réellement la solution miracle pour améliorer l’équilibre alimentaire de nos concitoyens.

D’abord, c’est une façon pour les pouvoirs publics de se donner bonne conscience à peu de frais, alors que l’éducation alimentaire des Français devrait être abordée dans les écoles de la République.

Ensuite, l’apprentissage nutritionnel, c’est long et exigeant. C’est un vrai travail de fond. La lutte contre l’obésité passe par une maîtrise de plusieurs facteurs : les quantités, les associations d’aliments, l’activité physique, et même le métabolisme de chacun. Autant de paramètres qui se réduisent difficilement à une couleur.

Le tableau nutritionnel situé à l’arrière des emballages est-il insuffisant ? Faut-il l'améliorer ? Si on met des codes couleurs, faut-il alors le supprimer ? Si on le garde, ne frôle-t-on pas « l’infobésité » pour le consommateur ?

Sans compter que par cette initiative, les pouvoirs publics continuent à travailler en silo : un ministère la nutrition, un autre l’environnement, un troisième l’énergie. N’est-il pas temps de travailler en transversal ? Qu’est-ce qui est le plus important, un produit « vert » mais élaboré dans des conditions écologiques déplorables ? Un produit « orange » mais respectant des normes strictes en matière de déchets, d’eau, de consommation d’énergie et de transports ? On voit bien que selon la lorgnette par où l’on regarde, la réponse n’est pas unique.

L’info complexe sans pédagogie, c’est inefficace

Les industriels comme les distributeurs n'iront pas volontairement se tirer une balle dans le pied. Vous croyez vraiment que Franck Riboud ou Richard Girardot (Nestlé) vont prendre le risque d'apposer un feu rouge sur un produit plébiscité par les consommateurs ? Évidemment, non.

Pour sortir des polémiques, des rivalités et des luttes d’intérêts, je crois utile de se reconcentrer sur le PNNS (Programme National Nutrition Santé), auquel E.Leclerc était d'ailleurs l'un des principaux contributeurs.

A mon avis, dans un plan nutrition où tous les acteurs publics et privés sont impliqués à la hauteur de leurs responsabilités réelles, il n'y a aucune raison de vouloir unifier toute information non obligatoire, et sur la base d'un même cahier des charges, laissons chaque industriel rivaliser de créativité, multiplier les expériences. Les pouvoirs publics pourraient alors rester dans leur rôle, ne serait-ce qu’en valorisant les meilleures pratiques.

5 Commentaires

Dans un tout autre domaine, vous aviez annoncé (en 2013 je crois) que d'ici fin 2015, l'ensemble des magasins du groupe serait équipés de borne de recharge électriques.
Le moins que l'on puisse dire est que peu de gérants vous ont entendu. A ce rythme là il faudrait reporter l'échéance à 2050. Et je ne parle des qques installations déjà faites car il y a aussi beaucoup à dire. Cordialement.
Pour l'instant quand on laisse faire les industriels il rivalisent de créativité pour pour nous leurrer.
La FCD, un syndicat jaune???? Vous faites beaucoup d'honneur à la FCD en le qualifiant ainsi cher MEL!!!
La FCD a pour objet d'être un syndicat patronal, jaune par essence... Mais l'est-il encore, "syndicat" du moins???
Ce qui est gênant en effet, c'est que la FCD est de moins en moins le faux-nez de Carrefour et de plus en plus évident qu'elle roule ouvertement pour son premier cotisant, selon une tradition que Jérôme Bédier ancien "président salarié" de la FCD aujourd'hui DGA salarié de Carrefour avait inauguré avec Daniel Bernard. Il a dû mettre les pendules à l'heure avec son successeur...
Le système d'étiquetage nutritionnel proposé par Carrefour à l'automne dernier et celui "inventé" par la FCD il y a quelques semaines présentent des différences qui relèvent du foutage de g... absolu. Ainsi, les pictogrammes sont les mêmes, les codes couleurs également! Les textes sont également éloquents et l'attribution des fréquences laisse songeur :
- le pictogramme violet de Carrefour proposait "de temps en temps" qui devient "occasionnellement" avec le pictogramme de la FCD : il s'agit là d'un synonyme assez rigoureux ; de nouveau un copier/coller...et là, tout dérape :
- le pictogramme orange de Carrefour proposait "une fois par jour" celui de la FCD "1 à 2 fois par semaine" : soit 7 fois par semaine versus 1 à 2 fois par semaine ;
nulle nécessité d'aller plus loin pour avoir un doute plus que légitime sur la réalité et/ou le sérieux des études scientifiques dont se recommandent aussi bien Carrefour que la FCD pour produire leur(s) dispositif(s). Un peu plus de sérieux tout de même...
A moins qu'à un peu plus de 400 ans d'écart, il s'agisse là d'une nouvelle illustration de l'aphorisme rabelaisien selon lequel "science sans conscience n'est que ruine de l'âme"!
Peu importe! En revanche le mystère reste entier sur les raisons qui poussent les Auchan, Casino, et désormais de nouveau Système U à accompagner une telle farce qui les discrédite nécessairement auprès de leurs clients sur un sujet qui les touche directement! On est quand même très très loin du "bien manger" prôné par Système U!!!!
A moins que le peu de cas que la plupart de ses membres font de la FCD (Fédération Carrefour de la Distribution) explique cela?!
Le patronat ne "mérite" visiblement pas mieux, hélas!
Les consommateurs : si.
Bonne continuation cher MEL.
Laurent
Avec votre règle des 4 tiers j'ai l'impression que vous voulez légitimer le droit de prendre deux parts de quatre-quart à la pause café. Mais c'est plus gras et donc plus calorique avec ses jaunes d'oeufs en plus riche en lipide contre un 1/2 pate à pain (farine+eau) 1/4 sucre et 1/4 beurre.

Une adresse: http://www.kouign-douarnenez.com/kouign-amann-xsl-244.html
Bonjour Mme, M., problème très ordinairement simple (!), oui-iiii... nous n'avons, helas, pas toutes et tous absorbés "un bon traité de biochimie alimentaire" et (?) vas-y que je te bouffe, et vas-y que je t'avale et avale, toutes proportions gardées...!, des quantités monstrueuses, quantités de bouffe, alors le travail des honnêtes distributeurs et des M. Leclerc il est énorme, faire comprendre que, "le bien se nourrir mes chers citoyens " c'est être et en tout moderer. Bonjour, oui bonjour le taf et ne parlons surtout pas des sujets qui sont facheux; aux larmes citoyens... Merci. Bye. Mich.

Laisser un commentaire

Cette adresse n'apparaîtra pas à la publication