Bloc-notes : Macron, Désir, Juppé, Grandguillaume, Cahuzac, Sarkozy… et la crise du politique

Macron / Rocard, même filiation ?

Comparaison n'est pas prévision de destins. Mais si Mitterrand avait mangé tout cru un Rocard un peu trop ambitieux à son goût, Hollande n'a su ni profiter de Macron, ni le manger à temps. Hollande n'est pas Mitterrand.

Sauf à imaginer un deal secret entre eux, le terrible aveu que le Président vient de laisser fuiter ("il m'a trahi avec méthode") témoigne de son désarroi.

Macron prendra-t-il son envol ?

Il fallait à Macron une fenêtre et des caméras. Août était manifestement le bon créneau. La suite ?

Pour gagner une élection, il faut des réseaux (pas seulement patronaux…) et des bras motivés pour coller les affiches, tracter les programmes, frapper aux portes et serrer des mains. Emmanuel Macron saura-t-il faire ? C'était le sujet politique n°1 des médias ces derniers jours.

Pour l'heure (et en attendant le programme), c'est la réaction de la classe politique qui est intéressante.

A lire les réactions de la droite, de la gauche et du centre, on voit qu'Emmanuel Macron désempare une classe politique qui s'accroche à un mode de représentation et de gouvernance de plus en plus contesté. La plupart des leaders, à l'exception de Juppé et de Lagarde (UDI) disent leur irritation, laissent transpirer une forme de jalousie (Bayrou ? Cambadelis ?) et montrent, malgré cette crise évidente des institutions, leur préférence pour l'immobilisme.

Que faut-il attendre des primaires ?

Dans les sondages, 85% des Français ne veulent ni de Hollande ni de Sarkozy à la présidentielle de 2017. Le problème, c'est que le système des primaires a de fortes chances de produire ce scénario.

Les conditions de candidature à la primaire sont telles qu'elles reproduisent un système quasi-censitaire qui donne une prime aux barons bien ancrés dans le sérail (cf. les difficultés des petits candidats à trouver des parrainages et qui espèrent parfois qu'un des "gros" candidats leur donne un coup de main).

Des personnalités comme Macron, NKM ou Hamon vont devoir tordre le cou pour enfiler le licol de la candidature aux primaires. Tractations, report de voix, déclarations d'allégeance ! Pas facile de jouer solo quand on veut se poser en renouveau générationnel.

Maroquins en toc ?

Du mode d'élection à celui de la nomination ministérielle, tout a l'air bricolo. De quoi saper la légitimité du pouvoir. Comment ne pas comprendre la désaffection voire l'irritation populaire ?

Tiens ! Pendant qu'on nous cause de Macron, de Hollande ou de Sarkozy, avez-vous remarqué qu'un ministère avait purement et simplement disparu. Savez-vous lequel ? Je vous le donne en mille, ignares que vous êtes, c'est le ministère de l'égalité réelle !

Vous ne savez pas ce qu'est "l'égalité réelle" ? Rassurez-vous, de toute façon ça n'existe plus ou en tous les cas il n'y a plus de ministre pour s'en charger, l'ex-ministre de l'égalité réelle, Ericka Bareigts, étant devenue ministre de l'outre-mer en remplacement de la démissionnaire, George Pau-Langevin.

Et le nouveau ministre de l'Industrie ? Que va-t-il pouvoir faire dans cette galère ? Il ne disposera que de 8 mois pour prendre connaissance des dossiers. C'est court. Qu'est-ce qui peut le motiver ? Une récompense pour avoir bien travaillé sur la loi El-Khomri ?

J'aime bien Jean-Marc Ayrault. On est d'accord ou pas d'accord avec lui, mais c'est un homme bienveillant, depuis toujours engagé dans la défense du bien public et de l'intérêt collectif. Mais à part le statut de Premier ministre, quelle est sa vision, quelle est sa contribution au décryptage et à l'actualisation des positions françaises dans les nouveaux dossiers internationaux ? Germanophile et germanophone, j'aurais pensé qu'il s'exprime pour soutenir notre partenaire allemande après le coup de semonce du Mecklenburg. Où est la voix de la France en Europe ?

Heureusement que Moscovici a su rétablir, le temps d'une phrase, notre crédibilité vis-à-vis des Européens. Contester le mandat de négociation de la Commission sur le TAFTA alors que la FRANCE l'a renouvelé 15 jours avant, ça faisait un peu zozo. Mais Mosco n'est pas (plus) ministre.

Le Secrétariat d'Etat aux Affaires européennes, lui, existe et il y a même un titulaire du poste. Alors qu'on a fait beaucoup de cas du Brexit, l'avez-vous entendu sur le sujet ? Au fait, savez-vous qui en est le titulaire…? Notre Harlem Désir brille vraiment beaucoup par ses silences !

Remarquez, je n'ai pas non plus entendu la ministre du Commerce (dont vous ne connaissez pas non plus le nom) s'exprimer sur la fiscalité des services, l'évolution du dossier FNAC/Darty, les centrales d'achat, le match sur la fiscalité numérique et physique…

Je n'ai jamais eu l'honneur de la rencontrer. Nous lui avons écrit cet été pour connaître les directives applicables au commerce pendant l'état d'urgence. Pas de réponse…

Crise du politique

Si on ne sait pas toujours à quoi ça sert un ministre, pourquoi tant de gens rêvent de le devenir ?

A l'heure de l'hyper communication, des réseaux sociaux, les Français ne sont plus dupes de ces situations navrantes.

Et si le système politique s'accommode d'un tel manège, pourquoi s'étonner que du sérail, de temps en temps, s'échappent quelques loups solitaires du type de Macron ?

Le député Laurent Grandguillaume (qui a commencé sa carrière professionnelle dans les centres E.Leclerc!) contraste un peu avec le milieu, en annonçant dès à présent qu'il ne briguera pas de nouveau mandat et qu'il reprend ses études. Les mauvaises langues disent sa circo difficilement gagnable (hors vague rose). Peut-être. En attendant, l'homme ne cherche pas un autre parachute politique, il réoriente complètement sa carrière et construit son projet professionnel vers l'entreprise. Combien osent faire pareil ? Bonne chance à lui.

Chez Casto, y a tout c'qu'il faut…

A ce stade, le Tournez-Manège ministériel et les rebondissements judiciaires sont des sujets pour le Canard Enchaîné.

Tiens ! Je pense aussi à Cahuzac. Après avoir réanimé les syncopes capillaires de nombre de personnalités internationales, le voilà qui ressuscite les morts en convoquant Michel Rocard à la barre du tribunal à propos de son histoire de comptes en Suisse. La grande classe !

Mais si l'on ajoute l'ex-VP du MODEM, radié pour avoir joué les Sous-Préfets aux champs chez Casto, et ce politique influent du FN pris "le cou dans le collier"… j'aurais envie de crier – bien que je n'en sois pas – Charlie reviens, ils sont devenus fous !