primaires
SOCIÉTÉ Politique

Politique française : le grand soir, c'est pour après-demain !

C'est du délire. S'en rendent-ils compte ? Que François Hollande, aigri, préfère ostensiblement aller au théâtre plutôt que de suivre le deuxième round des primaires du PS, c'est déjà un sacré désaveu.

Que Manuel Valls parle "de tourner la page du quinquennat" alors qu'il en a administré les derniers mois, c'est quand même le comble.

Et qu'enfin, par l'entremise de Ségolène Royal (activiste comme jamais), et d'autres proches, on tente de laisser penser que Hollande appellerait à voter Macron (idée démentie par l'Elysée), c'est quand même un sacré jeu de massacre.

On voudrait discréditer le processus des primaires que l'on ne s'y prendrait pas autrement.

SOIREES TELE…

J'avais regardé le premier débat (celui sur fond bleu) depuis l'écran de télé de la salle de sport.

Mon dieu, quel ennui ! Enervé, le spectateur attentif que je fus, abandonna 650 kilos-calories sur son tapis de course, sitôt reconquis par la consommation frénétique d'une tablette entière de chocolat (Marque Repère, évidemment !) pour compenser ce manque de chaleur, de solidarité, de rêve, de fusion …

Pas moins de 7 candidats ! Mais, qu'ont-ils été faire dans cette galère?

Les plus jeunes, les plus "différents", avaient l'air, dans ce décor que l'on dirait élaboré pour un bingo commercial, de passer une épreuve pour le concours de Sciences Po. ou de l'ENA. Appliqués, studieux, récitant parfois leurs fiches, les hommes étaient figés derrière leurs costumes cravates, Jean-Luc Bennahmias jouant, sans frais, le rôle du Monsieur Loyal.

J'ai adoré le billet de Franck Johannès (Le Monde 14.01.2017), rappelant à propos de Sylvia Pinel, que si elle fut et reste une jeune ancienne Secrétaire d'Etat au Commerce, elle appartenait vraiment ce soir-là au "plus vieux parti de France".

Deuxième débat hier soir (cette fois sur fond rouge). C'était plus intéressant.

Montebourg et Valls se sont livrés  - non sans humour, mais il faut aimer le second degré - , à une surenchère, pour affirmer qu'ils croyaient dans leurs chances respectives.

A la question de la loyauté dans le soutien qui sera apporté au vainqueur de la primaire par tous les autres compétiteurs, j'ai adoré les réponses de Valls et Montebourg : "oui, c'est pour cela qu'il faut que je gagne !".

DE L'INTERET DES PRIMAIRES

Franchement, quelles que soient nos convictions, et la qualité des candidats, ce genre d'émission n'aide pas à élever le débat. Le temps de parole de chacun est ridicule, formaté. C'est du twitter télévisé, sans spontanéité ni sincérité.

Je n'ai jamais caché que je ne croyais pas à l'intérêt des primaires.

Depuis deux mois, les médias m'interrogent sur mes éventuels choix partisans. Pas con de tenter le coup, mais bien naïfs sont mes interlocuteurs, s'ils imaginent que je vais ajouter aux engagements du Mouvement E.Leclerc, la défense de la République des start-up, la politique industrielle réduite au made in France, ou même – sujet passionnant ! – une politique sociale réduite aux comptes de la Sécu !

La primaire est de toute façon une machine à sélectionner, à dégommer, à se faire dézinguer, par les concurrents et surtout par le système médiatique. Les candidats sont obligés d'y défendre des positions caricaturales.

Quel avantage auront-ils à sortir même vainqueur d'une primaire ennuyeuse, alors que les médias exigeront, dès le lendemain de l'épisode, des nouveaux acteurs pour écrire les scénarios des présidentielles saison 3.

D'ailleurs, Macron, Mélenchon et Bayrou n'auront pas assuré le spectacle, mais auront bénéficié d'une couverture médiatique au moins équivalente, et de meilleure qualité sur le fond.

LE ROLE DES MEDIAS

Aux primaires comme probablement jusqu'à la présidentielle, les médias "feront la loi" sur la  forme et les contenus.

Les médias traditionnels, pourtant avares d'émissions sérieuses dans le domaine de l'économie ou du débat politique, profitent de l'exercice obligé pour légitimer leurs rôles. Mais vingt minutes par prétendant, pour 7 candidats, cela ne peut pas faire émerger plus de contenus que tous les échanges via Facebook.

Et sur ce territoire du net,  la loi des algorithmes va contribuer à enfoncer toutes les idées émises dans l'underground de Google, puisque le moteur de recherche doit apporter tous les jours son lot de produits frais pour percer sur la toile.

LE FINANCEMENT DES IDEES

Que faire pour le politique, quelle autonomie, sans capacités financières ?

Récemment, Jacques Séguéla reposait la question du financement des partis ou de la vie politique. Les politiques n'ont plus les moyens d'énoncer leurs convictions de manière autonome.

Les entreprises disposent de milliards pour faire la publicité de leurs marques et donc, comme dirait Natacha Polony : "Abrutir les masses et les manipuler par le marketing". Les médias, eux, sont carrément passés au privé depuis que le service public en matière d'information, court après l'audimat des premiers, au risque de les singer.

Il n'y a plus d'info, il n'y a que de la marchandise. Et pour être référencé dans le grand magasin de la télévision, c'est bien plus compliqué que d'entrer dans les rayons de Casino !

Mélenchon, ou même Marine Le Pen, ont su investir dans sur le net, pour le moment l'un des médias le moins coûteux ! Mais Mélenchon le reconnait lui-même : lorsque les médias ont choisi de faire des dizaines de couvertures et de titres sur Macron, les challengers sont bien à la peine pour se pousser du col devant micros et caméras.

Un jour viendra donc peut-être où l'on remettra en débat le financement des partis politiques et du débat public, que trop promptement notre défunt ami Michel Rocard avait fait disparaître.

Sans moyens, l'interdiction du financement des partis politiques s'apparente à l'euthanasie d'une démocratie qui s'abandonne aux médias, donc à ses marchands…et c'est un marchand qui vous le dit !

VIVEMENT LES VRAIES PRESIDENTIELLES

Il va falloir prévoir la sortie.

En saison 1, dans les primaires, chacun aura dû batailler pour rallier son morceau de camp et affirmer sa différence, rappeler l'un, qu'il est la "vraie gauche", quand l'autre, a été plus à gauche que la gauche, ou plus à droite que la droite.

Et ce sera pain béni (encore !) pour les médias, de faire passer ces candidats, sélectionnés par les  primaires, pour des girouettes, alors qu'il leur faut justement s'éloigner de leur seul camp pour aller conquérir le cœur de tous les Français en vue de la vraie compétition présidentielle.

Une gymnastique qui leur coûtera forcément le peu de points de sincérité et d'affect que les primaires auront apportés.

 

 

 

 

 

5 Commentaires

Bonsoir monsieur Leclerc
Il y a plusieurs années (30 ans ? ou plus ?) j'ai entendu ou lu une interview de votre père concernant le problème des machines qui viendront dans le futur "voler" le travail des humains. Longtemps, et bien avant que cette idée n'apparaisse dans certains programmes électoraux, ce grand visionnaire avait donné la solution : faire payer ces robots ! Pendant des années je l'ai cité lors de conversations politiques entre amis.
Avez vous connaissance de cela ? Peut être pourrez vous retrouver cette archive ?
Meilleures salutations
Martine Gosset
Salut Mel!
Les primaires de la droite et de la gauche auront eu le mérite de rationaliser le nombre de candidats à l'élection présidentielle ainsi que de démontrer à ceux qui en avaient besoin de certifier que leurs candidatures n'étaient pas souhaitées. J'aime bien l'idée du vote citoyen à ces primaires. C'est tellement rare que l'on nous demande notre avis.... C'est donc un début à la nouvelle démocratie participative qui est poussée par les flux d'informations venus des réseaux sociaux.
Bonjour M. Leclerc,
Merci pour vos billets savoureux.
Je voulais vous demander si vous aviez un avis sur le revenu universel. On en parle beaucoup en ce moment...
A vous lire
Sylvie Marchal
Surprenant de lire ce type d'article sur votre site. Très belle plume pour d'écrire la jolie blague politique qui se joue devant nos yeux. Merci!
650 kcal en chocolat, vraiment? ;)
Good post!

Laisser un commentaire

Cette adresse n'apparaîtra pas à la publication