ÉCONOMIE Pouvoir d'achat

Anne-Lucy, Yasmine (ECS Paris) et le comparateur de prix E.Leclerc

Dans la revue de presse que je reçois quotidiennement, mon attention a été attirée par un article publié le 15 janvier dernier et qui titrait «Les hypermarchés se livrent à une guerre publicitaire sans fin ». A l’heure où tous nos concurrents se frottent à la publicité comparative, je n’ai pas résisté et j’ai cliqué sur le lien pour en savoir plus sur le propos qui y était développé.

En fouillant un peu, j’ai compris qu’Anne-Lucy et Yasmine étaient des étudiantes et que ce texte était peut-être un exercice qu’elles avaient réalisé dans le cadre de leur mastere 2 «Option communication 360°» à l’ECS de Paris. Laisser des étudiants dans l’erreur ne faisant pas partie de ma philosophie, je prends donc quelques instants pour expliquer à Anne-Lucy et Yasmine pourquoi certaines de leurs assertions ne sont pas fondées.

D’abord, parlons performance-prix

Avant de parler de la communication sur le prix, il faut étudier la performance des enseignes sur les prix. C’est toujours mieux de commencer par décortiquer l’objet sur lequel s’appuie la communication.

Anne-Lucy et Yasmine ont raison sur un point. Avec la multiplication des pubs qui clament « je suis le moins cher ! », le consommateur finit par s’y perdre. Si tout le monde est « le moins cher », qui est vraiment « le moins-moins cher » ? Nos deux compères estiment qu’il est impossible de le savoir et que chaque enseigne communique finalement sur ce qui l’arrange.

Elles relaient là certainement une pensée partagée par beaucoup de Français. Pour autant, ça n’en fait pas une vérité. Alors Anne-Lucy et Yasmine, laissez-moi vous expliquer le processus.

Il existe dans notre métier, deux organismes indépendants qui scrutent de près les prix pratiqués par les principales enseignes de la distribution, et qui publient très régulièrement leurs analyses.

Ces outils répondent aux doux noms d’Opus (Nielsen) et de GPS (SymphonyIRI). Je puis vous assurer que leurs publications sont attendues avec fébrilité dans le milieu de la distribution, toutes enseignes confondues. Leurs analyses reposent sur les remontées de caisses des magasins, portent sur tous les prix de tous les magasins de France. Les données sont exhaustives.

Or que nous disent ces deux organismes avec récurrence ? Qu’E.Leclerc est en moyenne au moins 4% moins cher que ses concurrents. Ce n’est pas E.Leclerc qui le dit, ce sont deux organismes indépendants et reconnus par l’ensemble des acteurs de la distribution française. D’ailleurs, pour preuve de leur fiabilité, pratiquement toutes les enseignes achètent à prix d’or ces données.

De la performance-prix à l’image-prix

Notre problème était le suivant : comment faire connaître cette réalité des écarts de prix, sachant que ces deux organismes refusent la diffusion grand public de leur travail ?

Notre solution a été de créer en 2006 notre propre comparateur «quiestlemoinscher.com». Nous avons construit ce comparateur avec la volonté de coller au plus près de l’objectivité des données publiées par Nielsen ou SymphonyIRI. La méthodologie fut supervisée par un bureau indépendant (le BIPE) : méthode des quotas, tirage au sort des magasins…et surtout, sélection des produits dits «les plus détenus».

« Les produits les plus détenus », kezako ? Ce sont les produits qui sont les plus achetés par les consommateurs français (toujours selon les statistiques fournies par ces deux organismes). On n’est donc pas dans une sélection de « quelques produits qui [nous] arrangent » !

Au total, notre comparateur recense aujourd’hui quelque 1.800 produits (mesdemoiselles, je vous laisse « comparer » avec le nombre de produits analysés par nos concurrents !). Et pour ne pas être accusés de borner nos comparaisons aux seules marques nationales, nous avons intégré dans notre comparateur des produits MDD et 1er Prix. Qui dit mieux ?

Fallait-il s’arrêter en si bon chemin ? Non.

Du global au local, le comparateur dans le smartphone

Comme nous ne craignons pas la comparaison, nous sommes allés encore plus loin en créant l’appli « quiestlemoinscher » pour smartphone.

Avec cet outil (750.000 téléchargements à ce jour), vous pouvez scanner un code barre quand vous êtes chez un concurrent et votre téléphone vous informera du prix de ce même produit dans le centre E.Leclerc le plus proche du magasin où vous êtes situé. Par ailleurs, ce prix est régulièrement actualisé, donc l’argument sur « le prix du mois de mars » ne tient pas non plus.

Faites-le test Mesdemoiselles, et vous verrez que vous vous êtes lourdement trompées quand vous écrivez : « l’application de Leclerc donne en réalité un prix de panier sur la base du prix le moins cher pour chaque produit, c’est-à-dire dans la région où le Leclerc affiche les prix les plus bas, même si ce n’est pas votre région ».

Si vous scannez le prix d’un produit dans un hyper situé Porte d’Auteuil (au hasard à proximité de votre école), notre comparateur ne vous renverra pas sur un centre E.Leclerc de La Réunion pour le prix du kilo de bananes ou sur le centre E.Leclerc de Honfleur pour le prix de la bouteille de cidre ! Mais plus probablement sur celui de Levallois-Perret, de Nanterre ou de Rueil.

Nous comparons ce qui est comparable !

Anne-Lucy, Yasmine, une dernière précision : non, nous ne comparons pas nos prix de manière indifférenciée avec Carrefour Hyper et Carrefour Market. Si vous regardez bien nos publicités, vous verrez que ces deux catégories de magasins sont traitées séparément.

Enfin, vérifiez et vous constaterez aussi que nous n’avons jamais (oui oui, jamais !) intégré de Carrefour City dans notre comparateur.

On s’appelle on prend un verre ?

Allez, j’en arrête là. J’espère que vous aurez compris Anne-Lucy et Yasmine, que mon intention n’était pas de vous faire la leçon en public pour le simple plaisir de jouer « le sachant ». Mais vous devinez bien qu’en publiant ce texte sur Internet, désormais référencé dans des moteurs de recherche et accessible à tous, je ne pouvais pas ne pas y apporter quelques corrections.

N’empêche, comme je suis persuadé que vous aurez à cœur de vouloir mieux comprendre votre objet d’étude, je vous propose de prendre contact avec nous. Fabrice (notre expert pricing) et Philippe (notre directeur de la com’) se feront un plaisir de prendre le temps nécessaire pour vous expliquer toutes les subtilités du comparateur et de la communication qui en est faite ;-)

55 Commentaires

Félicitation pour votre initiative.

A terme, ce "poids CO2" converti en € devrait-être ajouté au prix HT des produits en lieu et place des taxes usuelles (TVA, ...). Ce nouveau prix TTC inciterait les industriels qui prônent à outrance le gaspillage (transport, emballage, Pub, ...) à réviser leur comportement, et les consommateurs sensibilisés par le porte-monnaie. Car c'est toujours par l'argent que l'on influence les comportements. Le produit de cette contribution carbone servirait à dépolluer la planète, s'il est encore temps !
Néanmoins la guerre des prix fait rages entre adherent et le comparateur ne permet pas de savoir qui est le moins cher entre eux... Autant je peux faire la comparaison avec les 10 U, 5 inter, et autre carrefour et auchan qui m'entoure, autant je dois ruser pr mettre en concurrence les adhérents entre eux ;)

Sinon à quand le retour de qui est le moins cher en magasin par les bornes info prix ou les tickets de caisse
Salut Mel!

J'attends avec impatience la réponse des intéressées à votre démonstration mais pas dans un esprit de polémique.
Tout savoir et tout comprendre lorsqu'on est étudiant relève de l'utopie.
Maintenant il est intéressant de comprendre les erreurs possibles pour mettre à jour les techniques de brouillage utilisées par les professionnels qui diffusent l'information.
Reconnaissez-le il y a de la finasserie dans tous les rayons et à tous les étages dans vos métiers.
Je vous ai entendu à la radio en fin d'année décrire votre activité comme une guerre permanente.
Alors j'ai envie de dire courage les filles! Vous avez peut être relevé des failles dans la communication de la grande distribution. Cherchez à comprendre par quoi vous avez été trompé et faites nous un article la dessus !
Lecteur assidu de votre blog depuis de nombreuses années... vous n'hésitez pas à "corriger" la copie de jeunes étudiantes tentant de réaliser une analyse extérieur de votre univers ou plutôt de la guerre des prix entre enseignes.

Le comparateur est perçu comme un outil appartenant à une enseigne...
Comparer n'a rien d'innovant même sur smartphone...
Evidemment en tant que consommateur je souhaite payer au meilleur prix mes courses mais ce n'est qu'une étape. A quand une vrai innovation ?
Une enseigne capable de m'aider à gérer mes courses en voilà un berceau d'innovation et de différenciation...
Ce n'est que le point de vue d'un simple consommateur !
Dernière question : à quand quelques articles sur les bonnes pratiques du commerce pour les jeunes entrepreneurs ? ;-)
Salut Mel!
Je profite de l'illustration de ce post pour faire ma réapparition. Je me suis retrouvé plongé dans l'ancien monde, celui sans internet. 2 semaines sont nécessaires pour changer simplement d'opérateur et économiser 10 euros sur l'abonnement.
N'est-ce pas un peu long? A l'heure du e-commerce, des services en ligne et des réseaux sociaux! La raison invoquée par l'opérateur, France Telecom qui reste maître du système...
D'un seul coup je me suis retrouvé sans mes informations fétiches et mes liens communautaires... Retour aux informations des prospectus, écoute des informations des vendeurs, et l'envie de sortir de la maison et d'aller me promener. Résultat, je me suis offerts des visites payantes dans les musées, j'ai acheté du matériel de bricolage, j'ai fait du shopping. Par contre la télévision n'est pas revenue.
Les 10 euros d'économie sur l'abonnement ont été largement engloutis!
Mais pourquoi faut-il dépenser toujours plus pour faire des économies?

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