Eurelec et le partenariat E.Leclerc-Rewe

Richard Girardot a porté des accusations aussi fausses que malveillantes à l'encontre d'une société européenne d'achat créée par E.Leclerc et son partenaire allemand Rewe. On aurait pu en rester là. Mais voilà qu'une journaliste de Challenges a souhaité relayer ses accusations à l'emporte-pièce, ce qui m'oblige à rectifier.

1) Y a-t-il révélation à propos de cette société Eurelec ?

Eh ben non : la presse professionnelle a depuis dix ans commenté abondamment le fait qu'E.Leclerc soit partie prenante d'une alliance coopérative (Coopernic) avec d'autres distributeurs européens (dont Coop Italia et Rewe dont je vous ai souvent parlé ici).

Ensuite, dès le 26 septembre 2016, Alain Caparros (alors Président de Rewe) et moi-même avons annoncé dans Les Echos la création d'Eurelec Trading et expliqué les objectifs de cette société commune : "Eurelec Trading est basé à Bruxelles. Nous sommes en train de recruter les équipes. C'est une société d'achats coopérative dont la vocation est de simplifier la relation avec nos grands fournisseurs internationaux, un interlocuteur unique, une facturation unique, un seul paiement".

Rien donc d'un montage opéré en catimini. La presse en avait déjà parlé, les administrations l'ont déjà visitée. Donc, où est le scoop, où est le mystère?

2) Les objectifs européens d'Eurelec

Pas la peine de raconter de fausses histoires et d'agiter le drapeau noir, Eurelec n'a jamais eu vocation à négocier quoi que ce soit avec des PME françaises ou allemandes.

C'est une société qui doit permettre aux magasins des deux enseignes, répartis dans 15 pays d'Europe, de bénéficier de l'expertise et de la massification issues de regroupements de commandes auprès des grandes marques internationales des secteurs de l'alimentaire, de l'hygiène, de la beauté, de l'électroménager, ou des produits techniques.

On fait en plus petit, ce que Nestlé fait pour ses approvisionnements, sur chaque continent ! ;-)

3) Détournement de la loi, avantage fiscal ?

J'ai failli m'étrangler à la lecture de Challenges qui l'insinue sans distanciation. De la part du PdG de Nestlé France, la manip' est ridicule, mais de bonne guerre. Mais de la part d'un journal économique sérieux, c'est surprenant.

Malgré l'inculture des élites françaises à l'égard des coopératives de commerçants, tout le monde peut savoir qu'une coopérative ne fait pas de bénéfices et que les magasins sont les seuls centres de profit. En conséquence, quel que soit le lieu où ils effectuent leurs achats, les centres E.Leclerc français paient la totalité de leurs impôts et taxes dans notre pays.

Voilà une réalité qui a dû échapper au PdG de Nestlé France, tant il doit être plongé dans la renégociation du énième accord fiscal franco-suisse permettant à sa société de rapatrier, sous les auspices de la fiscalité helvète, de succulents montants réalisés grâce aux consommateurs français. Et toc !

Quant au contournement de la loi, faudrait savoir.

A plusieurs reprises, Challenges comme beaucoup de journaux a relayé l'idée que j'aurais tenu la plume de Nicolas Sarkozy pour rédiger la Loi de Modernisation Economique (LME) qu'ils se sont plu à rebaptiser la "Loi MEL", tant elle serait favorable à E.Leclerc.

Et maintenant quoi ?! Challenges gobe l'idée qu'en fait, nous aurions créé Eurelec pour contourner cette fameuse LME ?!

Outre que je n'imagine pas nos amis allemands cautionner une telle idée, c'est totalement contradictoire avec ce que l'on me reproche depuis le vote de la LME ! C'est affligeant.

4) Conclusion

Voilà, c'est dit. Je n'en fais pas un tintouin, ni une dépêche AFP.

C'est très rare que je corrige publiquement un journaliste. J'accepte la critique, tout le monde le sait, et beaucoup ne s'en privent pas. Mais à l'heure où les médias promettent de corriger les intox, j'invite la rédaction de Challenges à le faire.

Sinon il me faudra classer cet article à la rubrique "fake news", à côté de celui d'avril 2015, où j'apprenais par cette même plume que j'avais réalisé un "incroyable deal d'un milliard d'euros avec François Hollande" en contrepartie d'une modification de la Loi Macron !

Quoi qu'il en soit, je ne me laisserai pas distraire par cette polémique. L'enquête parue ce matin dans Que Choisir, sur les prix élevés des produits bio, démontre que relever le niveau des prix (discours obsessionnel de l'ANIA) n'est pas l'alpha et l'oméga de la demande des consommateurs.