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Joël Egloff : L’étourdissement

Blog_240605_Egloff_joel C’est un texte très court, un récit émouvant. C’est l’œuvre d’un jeune écrivain. C’est le livre d’un grand écrivain. Je vous recommande, ce week-end, la lecture de « L’étourdissement » de Joël Egloff (Buchet-Chastel). Ne vous laissez pas déstabiliser par le décor. Ou plutôt, si. Quittez l’univers du bureau, oubliez un instant la douceur de votre foyer. Imaginez Tchernobyl, les anciens abattoirs de La Villette, les personnages du film «Affreux, sales et méchants » (Ettore Scola). Imaginez une campagne dont les arbres sont gris, les nuages oppressants et les pluies acides : « Les enfants sont pâlots, les vieillards sont pas bien vieux. On fait d’ailleurs pas toujours la différence entre eux ». Dans cette contrée en noir et blanc, le narrateur parcourt en vélo le trajet qui va de sa maison délabrée à son lieu de travail : un abattoir. Il y « épluche les vaches comme des bananes ». Le soir, à la maison, il vit avec une grand-mère qui se nourrit « des restes du chat qui n’a pas voulu finir les leurs ». Oui, c’est glauque. Comme dans le scénario d’un roman noir ou comme après une catastrophe planétaire. Nous sommes chez des survivants, des rescapés d’un monde industriel qui emploierait des zombies pour faire fonctionner des usines rouillées et bruyantes. L’esthétique, ici, ce sont des friches envahies par les détritus, la pollution, et le bruit des passages d’avions. Mais, bon Dieu, que ce livre est beau ! C’est cru mais jamais gore. C’est pathétique, mais jamais compassionnel. Ni révolte, ni résignation. Un détachement finalement insoutenable tant l’écriture banalise le rapport des individus à cet environnement hyperréaliste. « Le jour où je m’en irai, ça me fera quand même quelque chose, je le sais bien. J’aurai les yeux mouillés, c’est sûr. Après tout, c’est ici que j’ai mes racines. J’ai pompé tous les métaux lourds, j’ai du mercure plein les veines, du plomb dans la cervelle…et pourtant, je le sais bien que le jour où je m’en irai, je verserai une larme, c’est certain ». Dans ce décor surréaliste, mais pas tant que ça, l’espoir naît de l’amitié, de la tendresse, de l’humour. Tout cela est dit pudiquement, mais tel semble être notre destin. Joël Egloff a 39 ans. C’est son quatrième roman. Un jury, présidé par Françoise Xénakis, et composé des 85 libraires de nos espaces culturels lui a décerné « le Prix du Roman des Libraires E. Leclerc ». Ils ont eu un vrai coup de cœur. Brigitte Kernel, écrivain et critique littéraire à France Inter, participait amicalement aux délibérations. Pas étonnant que Joël Egloff ait reçu cette nouvelle distinction : le Prix du Livre Inter. C’est vraiment mérité !

11 Commentaires

Française, très active,je me suis remariee et j'habite Genève depuis trois ans. N'ayant plus d'obligations professionnelles, j'organise des dîners avec des invités prestigieux. Mon association s'appelle CONVERGENCES et nous rassemblons des anciens des grandes écoles (HEC SC PO, etc...) et beaucoup d'amis gènevois.
Nous serions heureux de recevoir Monsieur Michel-Edouard LECLERC qui nous parlerait de ses entreprises.
Avec tous mes remerciements
Colette CELLERIN
Je n'ai pas lu le livre de Joël Egloff, mais vous en parlez très bien.
Et puisque nous parlons littérature et que les hypers ne sont pas loin, j'en profite pour émettre un avis. Ou plutôt une suggestion.
Je comprends parfaitement les lois économiques qui amènent les hypermarchés Leclerc (et les autres) à proposer principalement des "best seller". Je concède en outre que les titres dits "de qualité" ne sont pas complètement absents. Mais noyés comme ils sont, dans l'océan des couvertures chatoyantes et racoleuses,, ils ont bien peu de chance terminer dans le caddy.
Puis-je alors me permettre une suggestion ?
- Chaque semaine un livre d'un grand auteur (j'entends par là un livre ouvrant de nouveaux espaces littéraires) mis en avant sur un présentoir, et agrémenté d'un commentaire (si possible enthousiaste) du libraire.
Cela peut être une nouveauté ou une sortie en poche. Cela peut être aussi un classique (je pense surtout à des classiques du XXième siècle : Kafka, Mann, Céline, Yourcenar etc). Il y a toujours une actualité (nouvelle édition, etc)
On me dira que c'est trop peu pour la littérature qui est bien malmenée par l'époque. Mais qui sait, certaines mains s'arrêteraient-elles sur cette couverture ; les yeux parcoureraient les premières lignes... Après, après... Les mots fragiles et subtils d'un grand livre, n'ont pas besoin de grand-chose pour exister...
Je ne comprends pas, je viens de poster un commentaire et il ne passe pas. Quezaco ?
C'est ton mari qui raque ma Colette? Si MEL veut pas venir, je veux bien moi, j'ai la dalle et je te fais une conférence de trois semaines sur la pauvreté...la prostitution conjugale aussi...mais là c'est toi qui en cause le mieux...
Toi y'en a comprendre ?
Toi y'en a ancienne française...mais tu sais que tu n'étais pas obligée de coller ton cv doré à l'or fin. Ici on s'en tape...
Re Cellerin (27/06/05)
Merci pour cette marque d’intérêt. Je réponds souvent avec plaisir à ce genre d’invitation qui permet de débattre avec des étudiants, des chefs d’entreprises et autres. Mais en ce moment, je suis vraiment « fully booked ». Je vous propose que l’on reprenne contact à partir d’octobre-novembre, où l’on pourrait faire coïncider un déplacement professionnel à Genève et cette rencontre.
Re Laurent Javault (27/06/05)
Suggestions intéressantes ! Je les transmets à mes collaborateurs des « Espaces Culturels » pour qu’ils voient comment les insérer dans leur propre planning d’actions culturelles. Mais vous savez, Laurent, nous ne sommes pas obnubilés par les best-sellers. Un espace culturel E. Leclerc détient entre 35 000 et 90 000 livres en référence de fond. Et ce commentaire sur Joël Egloff témoigne, s’il était nécessaire, de ma volonté de promouvoir de jeunes romanciers.
Merci de votre réponse. J'en prends acte et salue cette bonne volonté.
La culture est si menacée par les médias de masse que les grandes chaînes de distribution généralistes ou spécialisées (Fnac) se retrouvent face à une responsabilité que j'ose qualifier d'historique. Elles seules disposent des leviers pouvant empêcher la déculturation de la majorité de la population. Mon propos n'a rien d'élitiste. C'est un simple constat.
Et bravo pour votre blog. C'est une saine initiative.
Dans l'espace culturel où j'ai acheté mon Joel Egloff, aucun des libraires présents n'avaient lu le bouquin, Je ne leur en veut pas, j'ai travaillé en librairie, je connais le rythme des offices, et puis, on ne peut pas tous lire, Mais je dois dire que j'ai été assez déçu pour l'aspect conseil...peut être suis-je mal tombé.
Quant à la suggestion de Mr Laurent Javault, ne s'agit-il pas tout simplement du bon vieux "coup de coeur du libraire"...Personellement, j'ai fais le tour des GSS, j'ai été séduit à une époque où elle incarnait encore une sorte de modernité (fini la librairie poussièreuse et austère ), Finalement c'est peu de "service client", peu de suivi des commandes, voir pas de commandes du tout, attente en caisse, banalisation des assortiments... Aprés coup, je crois que si l'on recherche des références de fond et du conseil il vaut mieux s'en retourner à nos bonnes vieilles librairies de quartier.
Re Fred (7 août 2005)
Je ne garantis pas la réussite à 100%. J’espère, effectivement, que vous êtes mal tombé ! D’autant que le choix de Joël Egloff a été celui des libraires des espaces culturels E. Leclerc.
Votre deuxième observation est juste. Il faut des vrais libraires pour conseiller les lecteurs. Mais il en est de bons, dans certaines librairies comme dans les magasins spécialisés, et quelque fois même, dans les kiosques à journaux.
Tout cela pour dire que ce n’est pas tant la taille du magasin, ou l’emplacement de la librairie qui compte, mais la qualité des hommes qui ont fait profession de libraire.
j'ai lu le livre "l'étourdissemnt" de Joêl Egloff mais je n'ai pas compris la fin du récit. Je souhaite que quelqu'un qui l'a lu me l'explique.
j'ai lu le livre "l'étourdissemnt" de Joêl Egloff mais je n'ai pas compris la fin du récit. Je souhaite que quelqu'un qui l'a lu me l'explique.

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