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Rapport Attali : une 317ème proposition ? Chiche !

img_blog_attali_080208.jpg Anodine mais amusante réflexion de Philippe Mabille dans La Tribune du 8/02 : « Pourquoi Jacques Attali a-t-il arrêté son bras à 316 mesures précisément, et pas 300 » (chiffre repris pour la couverture du livre). Pourquoi pas un autre nombre ? Il s’aventure : « clin d’œil aux 613 mitzvot (commandements) qui…furent donnés par Dieu à Moïse et fondent la Torah » ? La tradition juive a toujours entretenu le mystère des nombres et pas seulement chez les Cabalistes. J’ai donc posé la question, ce matin, à J. Attali et j’attends la réponse. Mais je me risquerais bien à une autre explication. Il y aurait bien eu l’opportunité d’intégrer une 317ème mesure dans le rapport. C’est l’abrogation de la loi Lang. A part libraires et éditeurs, les lecteurs connaissent de moins en moins cette loi (1981) qui interdit de pratiquer des rabais sur les livres. C’est typiquement une mesure corporatiste. La Fnac, puis E. Leclerc, s’étaient battus contre cette mesure qui faisait partie des « déjà » 101 propositions de Mitterrand. Les tribunaux nous avaient re-toqués au grand soulagement de la profession arc-boutée à l’époque, comme les taximen aujourd’hui. Je n’arrive pas à croire que « le tombeur » des professions protégées ait incidemment oublié cette affaire. Il y a quelques jours, je débattais sur Radio Classique, avec Denis Jeambar et Eric Le Boucher (rédacteur en chef au Monde et membre de la Commission Attali). Ironiquement, je lui ai demandé l’origine de cet oubli. Il avait l’air sincèrement interloqué : « Tiens, oui, personne n’a abordé le sujet en commission ». Soit, mais de la part de J. Attali, esprit si universel, j’ai du mal à le croire. Il m’est venu cette idée, cette impression, ce début de soupçon, que, peut-être…il valait mieux qu’il en soit ainsi pour que le rapport soit diffusé ! Vous imaginez les cris d’orfraie des libraires si notre homme était revenu sur le sujet. Quant à Bernard Fixot, nul doute qu’il aurait dû mettre le livre au pilon. Bon ! Les méchantes langues trouveront là argument : « Il vaut mieux s’attaquer au corporatisme des autres professions plutôt que de s’en prendre au sien ». Dans le doute, je lui donnerais le bon Dieu sans confession. Mais à une seule condition : qu’il nous dise son avis sur cette législation…à cent lieues des recommandations de la Commission Attali. P.S. de dernière minute : Jacques Attali vient de me répondre, la Commission et lui-même sont favorables au maintien de la loi Lang.

54 Commentaires

Excusez moi pour ce pavé que je vais écrire bien après la bataille... mais la question de la défense du prix unique du livre est un combat majeur aujourd'hui pour la culture francaise. J'ai réalisé dans le cadre de mon Master de Science politique un mémoire sur le marché du livre en France, je connais parfaitement tous les tenants et les aboutissants de la Loi Lang.
J'ai été choqué au plus haut point en écoutant Mr Leclerc ce matin, jeudi 8 mai, dans l'Edition Spéciale, l'émission de Canal plus. Choqué sur la remise en cause du travail des pharmaciens bien évidemment, mais surtout par son discours sur le domaine qui me concerne en premier lieu, puisque professionnel du livre.
Autant Mr Leclerc a été repris plusieurs fois au cour de cette émission sur la question des pharmacie, autant personne n'est intervenu lorsque la Loi Lang et la remise en cause de la protection de la librairie indépendante est venue sur le tapis.
Je pensait fort naivement qu'il était clair et évident pour tout le monde que la loi sur le prix unique du livre était une bonne loi, admise par tous les professionnels du livre.
L'exemple du disque n'a malheuresement pas servi de leçon. Le dernier disquaire de France a fermé ses portes en Février dernier, et ce n'est pas seulement la faute au téléchargement sur Internet, légal ou non. Durant des années, les disquaires indépendants ont fait face à une conccurence terrible sur le plan des prix de la part des grandes surfaces de ventes de produits culturel, qui ont cassé les prix. Une fois tous les disquaires coulés, et les grands groupes dans une situation oligopolistique, ils ont relevé leurs tarifs à des niveaux records, bradant seulement de temps à autres quelques titres.
Aujourd'hui, non seulement le prix du disque est plus élevé que jamais, mais c'est surtout l'offre qui est de plus en plus réduite. De moins en moins de titres sont disponibles dans l'offre disque. Le tout se fait bien évidemment au détriment des artistes.
Les premiers protégés aujourd'hui par la loi sur le prix unique du livre sont les auteurs, et les éditeurs. Cette loi est la garantie d'une diversité du livre. Ce sont les libraires indépendants qui font souvent le succès d'un livre à ses début, qui prennent des titres d'auteurs inconnus dans leur rayon. Ce sont les libraires qui font découvrir et connaitre énormément de titres, et beaucoup d'éditeurs vivent grâce à eux. Les gros éditeurs bénéficient également de ce travail de fond des libraires qui ont souvent davantage d'ouvrage de fond que les grandes surfaces culturel ( ne parlons même pas des grandes surfaces alimentaires...).
Michel Edouard Leclerc dit faire ca pour augmenter le pouvoir d'achat des français. Bien évidemment, il oublie de mentionner que l'inflation dans le domaine est plus faible en France que dans les pays sans prix unique.
La disparition de points de ventes livre implique de plus petits tirages sur les livres autres que les best sellers et, au final, une augmentation de leur cout total de fabrication et commercialisation.
La plupart des pays de l'Union Européenne possèdent un système de prix unique du livre sous forme soit de loi, soit d'accord interprofessionnel. Les professionnels du livre belge sont favorables à l'adoption d'un prix unique du livre.
En Grande-Bretagne, le réseau de libraires indépendants est très fragile, alors que l'inflation sur le livre est plus forte que partout ailleurs.
Un abandon de la loi sur le prix unique du libre impliquerai également une éventuelle hausse de la TVA sur le livre.
Bref, tout ces éléments ne vont pas dans le sens d'une augmentation du pouvoir d'achat, bien au contraire.
Et si tel était le cas, le service et le travail des libraires indépendants ne mérite t'il pas d'être soutenu? Les marges sont déjà faibles sur le livre ( environ 35%), faut il enterrer des années, des décennies de passion pour le livre au nom de la rentabilité économique?
Un livre moins cher, oui! Un livre au rabais non!
Il ne faut pas tuer notre édition et sa diversité au nom de la démagogie. Le sujet de la baisse du pouvoir d'achat est à la mode, et Michel Edouard Leclerc l'a bien compris. Ce gourou médiatique manipulateur a réussi à convaincre les gens que la grande surface était le meilleur choix de consommation possible au meilleur prix. Il ne faut pas oublier pourtant que cet homme n'oeuvre pas pour le bien commun mais pour son intérêt personnel, que son combat n'est pas le pouvoir d'achat mais la rentabilité et les bénéfice de son enseigne.
Aurélien Brullebaut
Que M. Leclerc propose l'abrogation de la loi Lang ne me surprend pas. C'est de son point de vue (fort nombriliste) tout à fait compréhensible.
Que des consommateurs pensent qu'ils trouveront leur compte dans l'abrogation de la loi, là, je dit : regardez un peu plus loin que votre petit int^érêt immédiat.
La Loi Lang a permis de sauver la librairie de quartier, de permettre à de petits éditeurs de survivre.
Vous avez envie d'acheter tous vos livres dans les grandes surfaces ? Oubliez alors le conseil, l'engagement, le choix de libraires passionnés. Vous achèterez vos livres comme on achète une livre de beurre.
Les français sont des veaux. Ils ne pensent qu'à leur portefeuille.
M. Leclerc l'a bien compris. Tout comme ce crétin de député qui vient de proposer un amendement mettant fin à 20 ans de protection de notre culture.
Non, le livre n’est pas un produit comme les autres.
Pas de promotions sur les idées, pas de rabais à la curiosité, pas de limite à consommation (abus, même, fortement conseillé).
Le livre est l’aboutissement d’une réflexion, un don, un choix, un parti-pris qui ne naîtra jamais d’un cabinet marketing !
M. Mel, si la culture coûte cher, essayez donc l’ignorance !
Moi j’ai choisi, je retourne à mes livres et particulièrement au « Petit traité de la décroissance sereine » de Serge Latouche, évidemment acheté chez un libraire indépendant au prix de 3,50 euros.
sans la loi Lang nous n'aurons plus que du Lanfeust, du Treize et du Largo Winch...
Lisez "Du 9" !

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