Préserver la sécurité et la qualité

LA SÉCURITÉ ALIMENTAIRE

La démarche de traçabilité des produits dans laquelle s’engagent les industriels me semble indispensable mais insuffisante. Je prône :

- une remise en cause de certains objectifs économiques : une réécriture du cahier des charges des entreprises, en matière d’environnement et de qualité de vie,

- l’intérêt de la critique actuelle du productivisme, malgré ses excès.

La sécurité sanitaire en Europe n’a jamais atteint un tel niveau de qualité. On n’est jamais toutefois à l’abri de magouilles et l’histoire de la consommation est marquée par quelques tristes épisodes qui ne disparaîtront pas de sitôt.

Mais si les risques alimentaires sont moins nombreux qu’autrefois, les crises, elles, prennent des dimensions beaucoup plus importantes. Deux ou trois sociétés multinationales fabriquent 80 % des produits de chaque segment de l’offre sur le linéaire d’un hypermarché. Vu les contrôles, les risques sanitaires sont faibles. Mais quand il y a problème, ça fait évidemment du dégât.

Ceci étant, il est important de reconnaître aussi certaines avancées. Le dernier grand scandale sanitaire, la vache folle, a imposé à toute la filière de se remettre en question. Nous avons collectivement fait des progrès importants en matière de traçabilité des produits. Les magasins se sont adaptés, les industriels aussi. Aujourd’hui, on est capable en quelques heures ou quelques jours de remonter à la source d’un problème, d’isoler des lots, de prévenir les consommateurs. C’est une avancée considérable qu’il ne faut pas minimiser.

 

LA QUESTION DE ÉTIQUETAGE

Avec un seuil à partir duquel la composante d’un produit doit figurer dans la liste des ingrédients fixé à 0,9%, l’Europe impose l’une des législations les plus draconiennes au monde.

> Pour les industriels et transformateurs qui commercialiseront des produits OGM, l’application de ces normes ne pose aucun problème. Les produits s’afficheront « issus d’OGM » mais sans aucune indication supplémentaire : le consommateur ne saura pas dans quelle proportion le génie génétique aura frappé : 20% 50% ou 60% ?

> En revanche, l’agriculteur bio, l’industriel ou le distributeur qui voudront commercialiser des produits naturels devront supporter des coûts d’analyse exorbitants. Un comble ! Le plus scandaleux sera qu’à terme, on fera payer aux consommateurs qui voulaient acheter des produits naturels, tous ces investissements de séparation et de contrôle. Cela ne vous choque pas, vous, qu’un producteur de fruits naturels doive prouver la « naturalité » de son produit ? On inverse la charge de la preuve…

> Le seul antidote, comme le souhaitent les parlementaires danois, serait de faire assumer la responsabilité non seulement de l’étiquetage, mais de l’innocuité du produit, à ceux qui les produisent et les mettent en marché. Chiche !

 

LA QUESTION DES OGM

La méfiance des Français vis-à-vis des OGM est, à mon avis, venue du comportement de l’industrie elle-même :

- par son erreur de sémantique et de marketing : « les chimistes » ne peuvent prétendre qu’un produit alimentaire est modifié sans dire « en quoi il est modifié »

- par son absence de pédagogie et d’information vers les consommateurs : on nous aurait « vendu » des organismes génétiquement « améliorés » que déjà le public aurait été plus réceptif (c’est ce que font tous les innovateurs tant dans le domaine de l’automobile que du médicament)

- par sa précipitation : a-t-elle tenté de prendre de vitesse les pouvoirs publics condamnés à laisser le marché jouer le rôle d’un laboratoire expérimental, attirée par l’appât d’un marché estimé à 40 milliards de dollars ?

> D’où, le phénomène de rejet, initié par les différentes associations pro agriculture biologique.

Face au problème des OGM et plus généralement de la sécurité alimentaire, je suis :

- pour la mise en place d’une organisation de contrôle en France, suffisamment légitime, puissante et indépendante (à l’instar de la Food and Drug Administration aux Etats-Unis)

- perplexe face à la décision de la décision de Commission Européenne de mise en culture et de commercialisation des OGM en réglementant l’étiquetage de ces produits

- sceptique quant à la possibilité, sur le long terme, de mettre en place une double filière et de la contrôler.

> qui peut garantir l’absence de traces d’OGM dans les millions de tonnes de produits agroalimentaires importés et transformés sur notre continent ?

> quelle institution peut faire appliquer des règles dont le monde se méfie ?

> comment garantir le respect de la séparation des cultures (avec et sans OGM), du stockage et du transport ?

> à supposer que toutes les précautions avancées par les industriels (distance minimale entre types de plantations, décalage des périodes de floraison, élimination des repousses…) soient réalisables, qui financera le surcoût ?

> quid de la libre pollinisation (par le vent ou par les insectes) dès que les surfaces ensemencées dans les autres pays deviendront importantes ?

Même les labels bio seront menacés puisqu’à la moindre trace d’OGM la certification sera retirée !

Enfin, une question se pose sur l’alimentation animale. Notre pays importe chaque année des millions de tonnes de tourteaux de soja, servant à l’alimentation du bétail, en provenance des Etats-Unis ou du Brésil. Ne nous cachons pas les yeux, ils sont issus de l’agriculture OGM. Dès lors, n’est-on pas en train de nager en pleine hypocrisie ?