ÉCONOMIE Communication

Edouard de Rothschild (Libération) contre Patrick Le Lay (TF1) : match nul !

Les deux récentes Unes du Journal Libération ont fait couler beaucoup d’encre. Je ne sais pas si Bernard Arnault touchera des droits d’auteur, mais pour le racolage et la « provoc », chapeau ! Nous voilà revenus au temps des grandes  « covers » de Libé dont j’ai en permanence sur le bureau l’ouvrage de référence : Libération - Les Unes aux Editions de La Martinière. Une pépite, une grammaire malicieuse et provocatrice de l’Information. A la « grande époque », l’humour avait beaucoup de talent et ne sacrifiait ni à la lisibilité de l’engagement, ni à l’information !  Il y avait des dérapages, des « bides », mais les accroches alimentaient les contenus. Lundi soir, dans Le Grand Journal de Canal Plus, Michel Denisot recevait l’actionnaire principal de Libération, Edouard de Rothschild. Invité à commenter la première Une consacrée à Libé (« Casse-toi riche con »), Edouard ne s’est pas seulement retranché derrière la liberté de la presse et l’autonomie de sa Rédaction. Il a revendiqué « un bon coup marketing ». Bref, il assumait le caractère commercial de l’opération. Ça n’a pas eu l’air de choquer les journalistes présents sur le plateau. Partout, dans les autres médias, l’affaire Arnault a nourri les chroniqueurs, en leur fournissant la matière d’une journée de causeries dans tous les postes. Peu se sont offusqués à gauche. Dans l’émission d’Eric Revel, Le Club LCI, Laurent Joffrin, ancien patron de Libé, reconnaissait, lui, qu’une telle Une était inutilement outrancière. Celle de mardi matin, d’ailleurs, était plus fine. « Bernard, si tu reviens, on annule tout ! » Toujours campée dans le champ lexical de Nicolas Sarkozy, elle démontrait qu’on pouvait être incisif sans forcément être vulgaire et « bourrin». Ce genre de Une booste évidemment les ventes. Le commercial impose ses droits, même dans la presse, jusqu’à en perturber la vision d’une ligne éditoriale. En fait, au risque de provoquer (chacun son tour !), je pose cette question : quelle différence y a-t-il entre les propos d’Edouard de Rothschild (Libération) et ceux qui ont déchaîné la presse contre Patrick Le Lay (TF1) quand, en 2004, il affirmait : « Dans une perspective ‘business’, soyons réalistes : à la base, le métier de TF1, c’est d’aider Coca-Cola, par exemple, à vendre son produit, etc… » A l’évidence, Edouard de Rothschild roule d’abord pour lui (actionnaire) et pour la marque de presse dans laquelle il a investi. Mais faire du marketing façon Rothschild ou façon Le Lay, est-ce si différent ? On peut ne voir dans cette histoire qu’une forme d’humour. Certains ont invoqué une « libération de la parole » ou carrément une salutaire « montée des contre-pouvoirs ». Ne peut-on tout simplement admettre que les médias sont désormais, quel que soit leur positionnement politique, des acteurs du système marchand dont ils ont prétendu pendant longtemps qu’ils n’étaient pas asservis par ses lois. Même plus besoin d’invoquer les Situationnistes. C’est un fait : que l’information soit fournie par les Maisons Lagardère, Pinault, Perdriel, Niel, Pigasse, Rothschild, Ganz, Dassault, Arnault, etc… elle reste une marchandise. Et c’est comme tel, comme un client averti, qu’il faut l’aborder ou la consommer. Parole de marchand !

8 Commentaires

Etonnant marchand,
Au-delà de la pertinence (à débattre) de vos analyses sur le monde bavard des médias, c'est l'angoissant silence qui les entoure ici bas, ici même, dans ce petit a posteriori. Serais-je donc le seul à vous lire ou la ligne de front attendrait-elle son premier Sénégalais?
Méditons cela, MEL, étonnant marchand.
Voilà une une qui participe de la déliquescence du respect, respect que les jeunes casquettes à l’envers invoquent à tout bout de champs dans leurs joutes oratoires, et qui ne contribue pas à la démocratie apaisée voulue par le Président par opposition à la mandature précédente.
Après la famille Peugeot, c’est au tour de Bernard Arnaud
Je ne crois pas que les ouvrières de Lejaby, alors qu’elles étaient dans le concret, le dur et loin des bistrots parisiens aient demandé à ce « riche con » de se « casser » lors du sauvetage de leurs ateliers.
Je ne suis pas sur que les journalistes de libé se soient adressés ainsi à leur riche nouvel actionnaire alors que leur journal était en difficulté.
Quant à Monsieur de Rothschild, derrière ses justificatifs commerciaux, il pourrait méditer la phrase de Lénine « les capitalistes nous vendront la corde avec laquelle nous les pendrons»
Drôle de climat mediatico politique décidément ou d’un coté on constate une situation économique cata et on explique le déclin par de l’insuffisance de création de richesses et de l’autre on fustige tous ceux qui y participent ou sont en capacité de le faire.
Nos voisins européens et tous les émergents, ne sont pas dans la rodomontade mais dans la réalité et le concret
Salut Mel!
La presse en parle... et bien qu'elle continue!
Bravo et merci pour cette analyse Mr Leclerc .
Le fait que l'information soit détenue en France soit par de grands annonceurs publicitaires (Arnault) ou des marchands d'arme dépendant de la commande publique (Dassault, Lagardère ...) devrait nous alerter sur l'état de notre démocratie, nous qui sommmes toujours si prompts à vilipender l'Italie berlusconienne !!
Guy Debord avait -hélas !!- tout prévu, ainsi que Brecht avec son génial "Maitre Puntilla et son valet Matti".
Par ailleurs, je vous transmets toutes mes condoléances en ces circonstances douloureuses.
Etonnant marchand,
Au-delà de la pertinence (à débattre) de vos analyses sur le monde bavard des médias, c'est l'angoissant silence qui les entoure ici bas, ici même, dans ce petit a posteriori. Serais-je donc le seul à vous lire ou la ligne de front attendrait-elle son premier Sénégalais?
Méditons cela, MEL, étonnant marchand.
Voilà une une qui participe de la déliquescence du respect, respect que les jeunes casquettes à l’envers invoquent à tout bout de champs dans leurs joutes oratoires, et qui ne contribue pas à la démocratie apaisée voulue par le Président par opposition à la mandature précédente.
Après la famille Peugeot, c’est au tour de Bernard Arnaud
Je ne crois pas que les ouvrières de Lejaby, alors qu’elles étaient dans le concret, le dur et loin des bistrots parisiens aient demandé à ce « riche con » de se « casser » lors du sauvetage de leurs ateliers.
Je ne suis pas sur que les journalistes de libé se soient adressés ainsi à leur riche nouvel actionnaire alors que leur journal était en difficulté.
Quant à Monsieur de Rothschild, derrière ses justificatifs commerciaux, il pourrait méditer la phrase de Lénine « les capitalistes nous vendront la corde avec laquelle nous les pendrons»
Drôle de climat mediatico politique décidément ou d’un coté on constate une situation économique cata et on explique le déclin par de l’insuffisance de création de richesses et de l’autre on fustige tous ceux qui y participent ou sont en capacité de le faire.
Nos voisins européens et tous les émergents, ne sont pas dans la rodomontade mais dans la réalité et le concret
Salut Mel!
La presse en parle... et bien qu'elle continue!
Bravo et merci pour cette analyse Mr Leclerc .
Le fait que l'information soit détenue en France soit par de grands annonceurs publicitaires (Arnault) ou des marchands d'arme dépendant de la commande publique (Dassault, Lagardère ...) devrait nous alerter sur l'état de notre démocratie, nous qui sommmes toujours si prompts à vilipender l'Italie berlusconienne !!
Guy Debord avait -hélas !!- tout prévu, ainsi que Brecht avec son génial "Maitre Puntilla et son valet Matti".
Par ailleurs, je vous transmets toutes mes condoléances en ces circonstances douloureuses.

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