Lutte contre le gaspillage alimentaire : l'exemple de Rueil-Malmaison
Toujours enclin à vouloir exister à tout prix dans les médias, et quelque fois au détriment des acteurs économiques, certains politiques ciblent volontiers le secteur de la distribution. Facile mais énervant d’autant que dans le cadre de la lutte contre le gaspillage, la distribution a multiplié les initiatives sans leur soutien.
Il y a quelques mois, je vous parlais du formidable projet de Thomas Pocher dans le Nord de la France, avec les soupes "Bon et bien"
Aujourd'hui, je souhaitais faire ce petit focus sur le magasin de Rueil-Malmaison (92) où les dirigeants, Corinne et Olivier Bouteiller, sont depuis longtemps engagés dans la lutte contre le gaspillage.
L’organisation de la lutte anti-gaspillage au E.Leclerc de Rueil-Malmaison…
Récemment, ils sont passés à la vitesse supérieure en s'adjoignant les services de Phénix, une jeune société qui les épaule efficacement dans la coordination et la diversification de leur réseau associatif de redistribution.
La Croix Rouge était déjà un partenaire historique du magasin, mais elle ne pouvait récupérer les dons que deux fois par semaine, ce qui était insuffisant.
Phénix a su fédérer d'autres organisations locales (Le Relais Sévrien, le centre d’hébergement d’urgence « La Maison de la Colline », l’association d’Aide aux Victimes des Violations des Droits de l’Homme (AVDH), les associations « Dir el Kheir » et « Frères Humains ») et même le cirque Gruss ! De sorte que le magasin est en capacité de donner la quasi-totalité de ses produits à DLC courte.
Pour rationaliser ce projet, le centre E.Leclerc de Rueil a proposé à l’une de ses salariées, Virginie, précédemment hôtesse de caisse, de devenir la coordinatrice de la lutte anti gaspi. Tous les matins, elle trie et scanne les produits, puis confectionne les colis qui seront emportés par chaque association. Vladimir, adjoint à la qualité, la remplace quand elle n'est pas là, de sorte que le programme ne s'arrête jamais.
Selon les associations, les besoins ne sont pas les mêmes, certains ne prennent pas de viande ou seulement certaines viandes, d'autres pas de fruits et légumes, d'autres ne prennent que les plats préparés… Et puis il y a les produits interdits au don (abats, steak hachés, coquillages, certaines pâtisseries…). Bref, c'est du boulot, mais c'est une condition pour mener une politique de dons de qualité.
En 2015, le magasin a ainsi sauvé de la poubelle 154 tonnes de produits alimentaires, soit l'équivalent de 200.000 repas.
La place étant souvent comptée dans les réserves (surtout en milieu urbain dense), il faut pouvoir travailler en flux tendu et ainsi évacuer les dons dans la matinée. Au final, les rotations sont parfaitement maîtrisées, grâce au passage de deux organisations par jour, tout au long de la semaine.
Les jeudis et vendredis sont les jours de passage de la Croix-Rouge, car ce sont les jours d'ouverture de l'épicerie solidaire de Rueil-Malmaison.
… création d’une épicerie solidaire
Pilotée par le docteur Gérard Bleichner, sémillant retraité hyperactif, l'épicerie solidaire de la Croix-Rouge rassemble une trentaine de bénévoles.
Installée dans un local municipal, "l'intervalle" (c'est son nom) a tous les airs d'un petit supermarché de centre-ville. Côté approvisionnement, elle se fournit auprès de 3 magasins de la ville de deux manières :
- Par la collecte, comme lors des journées de don alimentaire des Banques alimentaires. A noter que cette année, le Leclerc de Rueil a explosé ses objectifs en atteignant 10 tonnes de dons collectés, soit le double des tonnages habituels.
- Par la ramasse auprès des magasins, toute l'année. Le centre E.Leclerc assure à lui seul plus de 50% de l'approvisionnement et les chiffres s'améliorent grâce au travail de Virginie et à la mobilisation des chefs de rayon.
L'épicerie gère ses stocks de manière optimale. L'équipe a même généré son propre réseau de solidarité et partage régulièrement ses surplus de marchandises avec d'autres associations du coin, de sorte que l'épicerie réduit ses propres pertes. Chapeau les bénévoles !
Un lieu de solidarité qui fait ses preuves
Créée il y a bientôt 10 ans, cette épicerie accueille 270 foyers (soit environ 800 personnes inscrites par les services sociaux), généralement dans des situations d'endettement, ne disposant plus que de quelques euros par jour pour vivre.
Les bénéficiaires de l'épicerie sont des personnes en grande difficulté financière, qui restent toutefois en capacité de subvenir partiellement à leurs besoins alimentaires. Les produits sont vendus à environ 10% du prix de vente dans le commerce.
L'idée est d'alléger temporairement la facture alimentaire de ces foyers, pour leur permettre d'honorer certaines dettes. Avec ce dispositif, plus d'un client sur deux parvient à payer ses factures en souffrance.
L'argent ainsi encaissé par l'épicerie sert à payer des factures et à compléter l'offre de produits par quelques achats (souvent pour l'hygiène). Le lait est le seul produit non vendu dans le magasin, c'est une condition imposée par l'Union européenne.
L'épicerie est aussi un lieu de convivialité et d'entraide. On y ressent beaucoup de bienveillance des équipes de bénévoles. Des permanences de juristes, d'associations de consommateurs ou d'assistance sociale sont aussi organisées.
Et demain ?
Demain, le don sera rendu obligatoire. C’est la conséquence d’amendements adoptés par des parlementaires qui depuis 5 ans essaient de s’approprier l’origine de ces projets. Mais qu’importent les polémiques ! Que la loi vienne couronner les actions privées déjà engagées ne changera pas la pratique des donateurs. En revanche, elle peut compliquer la vie des bénévoles qui ne seront plus maîtres d’une collecte systématisée.
Les associations redoutent de devoir faire face à une surabondance de dons, sans planification, qui les mettrait tout autant en difficulté que la pénurie.
En tous les cas, il va en falloir des camions réfrigérés, des frigos et des bénévoles pour faire face à l'afflux de dons.
Les pouvoirs publics doivent prendre conscience qu’il va leur falloir une tout autre logistique pour accompagner la montée en puissance annoncée !
3 Commentaires
Il était à bout de souffle. Cette frénésie autours de lui menaçait de lui faire perdre la tête à tout moment. Pris dans une tornade, il ne contrôlait plus le cours de sa vie. Il connaissait pourtant le proverbe « trop de tout nuit », il avait abusé de tout, ignorant l’avertissement, se retrouvait broyé par les événements. Aujourd’hui il était perdu, affamé, transi de froid, avec pour seul compagnon, jour et nuit : le désespoir. Son chemin de vie était sombre et il avançait sans but.
Alors il aperçut avec surprise un lieu qui semblait calme dans cette folie. De cet endroit, une silhouette lui faisait signe d’approcher. Tremblant de joie contenue, il se dirigea à grands pas vers l’éclaircie. Parvenu près de l’homme qui s’y trouvait, il le salua et le regardant avec espoir, murmura : « tout est si tranquille, où sommes-nous ?
-Ici mon ami, tu es au cœur de la tornade ; Tu peux te reposer, manger, reprendre des forces. Ensuite pour sortir de la tornade suis cette recommandation.
Cours de toutes tes forces retrouvées dans le sens de la tempête.
Si tu prends assez d’élan tu pourras t’envoler.
De nouveau tu arpenteras la vie sous un ciel bleu.
Tu t’abreuveras aux nuages, te baigneras de soleil et la nuit sera douce. »
C’est aussi ça la Maison de la Colline.
Un phare dans la nuit, le cœur de la tornade
Bruno, le 25 février 2013