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Remaniement : Les derniers des Mohicans
Difficile de comprendre, impossible d’y croire, encore moins d’y adhérer ! Le Président de la République avait parlé d’impulsion nouvelle. On pensait alors à une rupture, un virage, un coup de booster. Mais le premier message après la claque, c’est celui de la continuité : les discours, les intonations, les hommes, les habitudes…rien n’a changé. Comment peut-on être aussi autiste !
1) Comprendre ! Oui, qu’est-ce donc qu’en haut lieu, on a compris de ce mouvement de contestation qui parcourt la société française. Une rébellion sourde, qui a fait fi de l’avenir de notre Europe. Un sentiment de frustration, d’aigreur et de colère, au point que l’on a vu, dans l’électorat traditionnel de droite et de gauche, des Français parmi les moins extrémistes mêler sans complexe leur vote négatif à ceux de Le Pen ou de Besancenot !
La réplique du Président traduit l’isolement psychologique des chefs de la majorité. On reste dans le même film que celui auquel participait Jacques Chirac lors de sa rencontre télévisée avec les jeunes. « Je ne vous comprends pas…Vous ne me comprenez pas…Je voudrais vous faire comprendre ». Le divorce intellectuel, et oserais-je dire affectif, entre le chef de l’état et la nation n’a jamais été aussi criant. Pas étonnant que ce matin, à peine un Français sur quatre lui accordait sa confiance.
Il ne s’agit évidemment pas de bâtir de fausses promesses, ni d’inventer des recettes miracles. Mais alors qu’on évoquait la réussite des modèles danois ou anglais et qu’on attendait un « Blair » français, le Président verrouille les hommes et les discours, tel un monarque aux abois.
2) Y croire ? Je n’ai rien contre Dominique de Villepin. Je ne veux pas tomber dans le travers si fréquent qui consiste à flinguer une personnalité à partir de la seule image qu’il a souvent donnée de lui-même dans d’autres circonstances. Qu’il soit « flamboyant » ne me gêne pas. J’avais d’ailleurs aimé et adhéré à son intervention à l’ONU. Pompidou aussi fut poète, Mitterrand écrivit des livres dont le style n’a pas toujours eu la verve du « Cri de la gargouille ».
Idem pour Sarko dont l’énergie et la capacité d’entraînement sont incontestées. Mais qui peut croire en la longévité du tandem Sarkozy-Villepin. Qui peut croire en cet improbable attelage de deux hommes ambitieux qui n’ont jamais fait mystère de leur détestation réciproque. On pourrait ironiser et prendre bien du plaisir à suivre leurs démêlés si la perspective de leur étripage n’avait pour autre conséquence que de plomber la vie politique du pays jusqu’aux présidentielles. Deux ans encore avant de pouvoir concrètement changer la donne (les présidentielles). Deux ans de perdus pour le pays. Quelle poisse !
3) Y adhérer ? Le Président a écrit la feuille de route. Objectif, l’emploi ! Comme si ce n’était pas le leitmotiv de tous les Premiers Ministres précédents. Avec un tel taux de chômage, la France a-t-elle d’autre choix ?
Sur ce sujet, comme le disait Sarko, « on a tout essayé, sauf ce que l’on n’a pas osé ». Puisqu’il faut changer les recettes et lever les tabous, on attendait, à Matignon, un homme capable de susciter l’adhésion populaire ou de trouver les mots pour qu’une majorité des Français accepte qu’on s’attaque aux barrières qui nuisent à l’embauche. On aurait pensé, dans les rangs de la majorité, à Sarkozy lui-même ou encore à Jean-Louis Borloo. Ils ont de la « rondeur » et une indéniable capacité pédagogique. Ils n’ont pas peur d’aller dialoguer dans les usines, ni de parcourir les chantiers. Wanted : des hommes capables de déminer l’opposition caricaturale entre libéralisme et politique sociale, qui freine toute velléité de réforme et de modernisation. Chirac ne l’a pas vu de cet œil.
L’échéancier de ce gouvernement est très court. (D’autant qu’il a limité lui-même son délai de grâce à 100 jours : quelle erreur !). Ce qui compte, ce n’est pas tant la qualité des hommes (on leur en reconnaît) que leur capacité à convaincre rapidement. Tout se joue dans la perception qu’ont les Français de leurs élites. Ce n’est pas cet incroyable jeu de chaises musicales qui nous convaincra. Quelle occasion gâchée, encore une fois.
Quels que soient les avantages administratifs ou financiers, les chefs d’entreprise n’embaucheront que s’ils croient à l’effet mobilisateur d’une nouvelle politique. Idem pour les ménages dont le moral est au plus bas. Qui va augmenter ses achats, qui va investir dans un immeuble ou dans une voiture sans perspective d’augmentation du pouvoir d’achat à court terme ?
Je ne veux pas jouer les Cassandre. Mais moi, ce matin, comme beaucoup de Français, je n’arrive pas à y croire ! Je me dis que, décidément, on est mal gouverné.
22 Commentaires
1) Un président de la République qui prend soin de nommer son ministre de l'intérieur lors de sa déclaration télévisée ;
2) Un premier ministre qui s'invite au 20 heures de TF1 alors que son gouvernement n'est pas encore formé ;
3) Un ministre de l'intérieur qui accepte le job pour, dit-il devant ses amis députés, contrôler les officines !
4) des passations de pouvoir qui se répètent à flancs renversés : sarkozy/villepin, Jacob/dutreil. "Par ici, je vous fais pas visiter, vous connaissez la maison !".
Oui, tout cela est très bizarre !
http://derniereminute.hautetfort.com
Continuez le combat Michel-Edouard !
Ces dirigeants, sourds et egoistes, nous y conduisent tout droit...
Aucun espoir, aucun chemin..
Un Chirac qui en 3 ans est parvenu à fixer pas moins de 20 priorités différentes (une toutes les 6 semaines!) sans doute fixées selon la météo, je ne vois que cette explication..
Un Sarkosy, grand parleur superactif, démagogue à souhait.. prêt à brandir la tolérance zéro contre les sans-papiers au 20h.. mais quel lien avec l'emploi ? La peur de l'étranger, nous savons tous ou elle conduit..
Un de Villepin, à la parole aisée mais qui ne connait rien de rien aux réalités...
Un Douste, médecin, pour nous défendre et nous faire valoir aux yeux de l'Europe et du Monde..
La liste chiraco-chiraquienne est longue, très longue, trop longue...
Bien sur, pour l'emploi, on va sans doute diminuer les indemnités, durcir les règles sur le modèle britannique.. mais le levier, je crois, se trouve du coté des entreprises, du moins de ce qu'il coute à une entreprise pour embaucher.. il serait pourtant simple, presque évident de réduire les charges patronales.. pourquoi pas, puisque le zéro est à la mode, appliquer zéro charge pour 5 ou 10 ans à tout emploi d'un chomeur. Nombreuses sont les PME prêtes à augmenter leurs effectifs si cela leur coutait moins.. Le levier il est là, pas seulement, mais bien là tout de même.
En attendant, De Villepin a déjà grignoté 7 jours sur les 100, pour ne rien changer au gouvernement.. ca promet !
L'immobilier, grâce à des taux très attractifs, se porte bien, et l'automobile (qui, par ailleurs et sauf exception rarissime, ne peut être considéré comme un "investissement") se situe à des niveaux de vente honorables.
Si l'entrepreneur a certes besoin de visibilité et de stabilité pour investir, je ne suis pas persuadé que le consommateur lambda partage ces mêmes préoccupations conjoncturelles : l'achat d'un bien immobilier s'inscrit davantage dans une logique et un environnement personnels (obtention d'un CDI, capacité d'endettement, élargissement du foyer, …) qu'au regard d'une situation politique globale (sauf crise grave, guerre, krach boursier ...).
Je ne pense donc pas que ces deux secteurs soient les plus atteints par la récession du pouvoir d'achat.
Le gouvernement se donne 100 jours. 100 jours c'est 3 mois, quel hasard c'est en plein été. Quelles sont les véritables actions concrètes qui peuvent être appliquées lorsque les français partent en vacances. J'entends déjà les mauvaises pensées : et s'ils profitaient de cette période calme et de cette période durant laquelle le français n'est plus attentif aux réformes, pour justement les faire appliquer. Rappelons nous de cette phrase de l'ère Raffarin "ce n'est pas la rue qui gouverne" en plein été certes ça ne sera pas la rue. Je pense qu'il est totalement démagogique d'insinuer des résultats aussi vite. Monsieur De Villepin en avançant un tel objectif, vous venez, en cas d'échec, de déclencher une série de grève pour la rentrée de septembre. Je pense que vous êtes assis sur une cocote minute qui va pas tarder à exploser.
« Pourquoi les Français ont-ils choisi le coq pour emblème ?
Parce que c’est le seul animal qui les deux pieds dans la merde continue de chanter. »
Dans mon commentaire du 30 mai sous votre note « Chirac, la constitution européenne le referendum …et le peuple » je partageais la gueule de bois avec trenges.
Je disais que le non au referendum était « un non pour rien ! »
Ce gouvernement en est la preuve !
Et pourtant les Français étaient prévenus :
Chirac avait dit qu’il ne les comprenait pas et il avait annoncé qu’il resterait.
Voilà que, à l’exception du plus réformateur (Fillon) et du plus européen (Barnier), il remet en place ceux à qui le vote majoritaire a dit, une fois de plus, non.
Dans la m…nous y voilà
Ce non pour rien a pour conséquence :
- un très grand affaiblissement de la France au niveau européen et international
- une très grande faiblesse au niveau intérieur
Certes Villepin a du panache et quand il faut y aller, il y va (voir ONU) mais comment peut-on croire que, sous la houlette d’un Chirac majoritairement rejeté, il va pouvoir en 100 j. impulser ce que 20 ans de gouvernements successifs n’ont pas voulu, oser ou réussi à faire.
Comment croire que la majorité du non va écouter et entendre ceux-là mêmes à qui ils ont dit non ?
L’automne ou le printemps risquent d’être chauds
Blocages, reculades, abandons en perspective.
Cette démarche tactique :
-contrôler tout ce qui pourrait l’atteindre,
-faire, dans un an, acte de rupture avec le Président comme Chirac l’avait en son temps avec Giscard,
est dangereuse :
-elle apparaît trop tacticienne et ne le grandit pas,
- conflit de personnes il y aura avec tout son cortège de mesquineries et de petites phrases qui ne donnent pas une stature d’homme d’état au-dessus de la mêlée,
-il est à la merci de bavures policières et on peut être sûr que Chirac ne manquera d’imagination et d’hommes de mains pour le plomber,
-le mécontentement social grandissant se manifestera dans la rue et il sera obligé de défendre, sans doute sans conviction, le gouvernement auquel il appartient.
Qu’on soit pour ou contre le bonhomme il eut été préférable dans une perspective présidentielle qu’il passe son temps à peaufiner un programme pour le prochain quinquennat.
La gauche malgré son délabrement actuel y parviendra très probablement.
On aimerait en 2007 avoir un vrai choix sur des politiques et des moyens et enfin voter pour l’un ou pour l’autre plutôt que contre l’un ou contre l’autre uniquement sur des mots, des images marketing ou des préjugés !
Je ne suis pas nè pour assurer le bonne vie de l'autre qu'ils aillent se faire voir les entrepreneurs pas partageurs. Le salaires coutent trop cher! Ben merde alors...
Mais faut dire que ceux qui donnent le salaire possédent aussi l'appartement.
Vous avez du talent et de l’humour. Me permettez-vous de lui faire parvenir cette composition de votre cru. Je pense qu’il saura aussi l’apprécier.
A bientôt.
A propos de cette séquence que vous décrivez, j’écoutais Dominique Strauss-Kahn sur France Inter. Il parlait d’un parfum de « crise de régime ». Même si l’expression est exagérée, on a vraiment l’impression d’être dans une monarchie constitutionnelle à bout de souffle. La chance de Chirac, c’est que l’opposition est aussi complètement divisée.
Je ne peux que partager votre pessimisme. Et puis, d’accord aussi pour rappeler le rôle central des entreprises. Ce sont elles qui créent des emplois. Je reviendrai sur ce point la semaine prochaine dans une note sur l’emploi.
Je ne sais pas si l’Europe est unie dans le non, mais pour le moment, l’avenir n’est pas rose, convenez-en !
Ceci dit, l’histoire n’est jamais écrite d’avance. Un groupe de pays pionniers peut relancer l’aventure. Simplement, elle sera forcément difficile à écrire à 25 plutôt qu’à 15 !
D’accord avec vos remarques. Je nuance mon propos. Je suis sans doute trop focalisé sur le marasme des biens dits « de grande consommation ». Mais ne parle-t-on pas aujourd’hui d’une bulle spéculative sur l’immobilier et d’une montée excessive des loyers ?
Une étude du BIPE, mandaté par mon groupement, révèle le poids des charges contraintes afférentes aux loyers et à l’équipement de la maison. Certes, les taux d’intérêt sont faibles et facilitent les acquisitions. En même temps, l’accroissement de la demande (sur Paris, par exemple) fait monter le prix des loyers qui plombent les budgets. Paradoxalement donc, l’activité sur le marché immobilier peut être préjudiciable au reste de la consommation. (Il faudrait étudier cela plus à fond).
Tu soulèves un problème politique majeur : le non ne sera jamais assumé par ses leaders, tout au moins ces deux prochaines années. Ils vont donc rester dans cette posture qui entretient chimères et fausses promesses. Le fossé ne peut qu’être total entre les aspirations de ceux qui ont voté non, et ceux qui, ayant appelé à voter oui, veulent sauver leur place.
Vos propos illustrent à quel point le modèle social français devient complètement pervers. A force d’avoir fait supporter aux seules entreprises créatrices d’emplois le financement de tout le système social (charges et cotisations patronales), le salarié est considéré comme un coût, et non comme un investissement. Là où des entreprises devraient proposer de payer cher une main-d’œuvre de qualité pour profiter de l’expertise des « meilleurs », c’est une stratégie défensive qui s’installe : moins de coûts pour moins de charges, donc une grille des salaires tirée vers le bas.
Cette observation montre aussi que si on veut sortir du chômage, il faut à la fois diminuer le coût du travail (à salaire égal), mais aussi favoriser la relance de l’investissement. C’est à l’occasion d’achat de nouveaux matériels, de développement de nouveaux produits innovants, qu’on embauche des salariés de meilleure qualification.
Et il y a des cons pour gober celà...
Il y a des cons pour croire que l'on peut saigner les fournisseurs sans que cela nuise aux salariés des dits fournisseurs....
Il oublie aussi de préciser les conditions de travail déplorables dans la grande distribution, et en particulier dans les enseignes Leclercs!!!
Mais regardez donc la tetes des caissieres...
Ca respire pas vraiement le bonheur...
Et les vieux salaries chez leclercs?
On fait quoi? Du paté? du Savon? des granulés pour chiens?
Forcément un truc de ce genre là... Par-ce que des vieux? y'en pas chez leclercs!
Mais jojo le démago va nous dire que chez Lui... on ne viellit pas.
Quand aux charges sur les salaires.... Elles ne semblent pas vraiement empêcher les leclercs et autres, de s'enrichir outrageusement.
Aller! Chiche! que le grand Zorro, se batte pour que les charges ne soient plus calculées sur les salaires, mais sur le bénéfice... avant investissement et autres fantaisies, bien sûr.
Bien le bonsoir.
Tout est améliorable, même chez E. Leclerc.
L’activité des centres E. Leclerc n’est pas lésée par le poids des charges sur les salaires. Tout simplement, parce que nous sommes dans une position relative à nos concurrents qui est identique. Ils ont le même cahier des charges. Tel n’est pas le cas des industriels ou des sociétés de services qui sont en compétition avec des étrangers pour capter des marchés extérieurs, ou même pour approvisionner le marché français. Quel que soit le degré de démagogie dont vous m’affublez, la réalité est encore plus consternante : 200% d’écart sur les salaires, plus 50% d’écart sur les charges, ça ne permet pas aux entreprises françaises de rivaliser avec leurs homologues de l’Europe de l’Est par exemple.
Allongé sur le sable, oubliant l’actualité et ses naufrages, je consultais ce mini-journal qui m’informait ici de l’histoire ostréicole du Bassin et là racontait l’histoire de Claudine Reynier habitant l’environ et signant son premier roman « La Canarde » aux éditions Théles, en passant par une passionnante narration de l’épopée de la langue Gasconne, le tout au milieu d’annonces et de publi-reportages sur les commerces locaux.
Mais vint le bouquet final, l’édito de la semaine, tirant un bilan de la saison touristique qui s’achevait . Et, là, patatras, retour au « réel » sous la plume du responsable de la rédaction Jean Alexandre qui en parlait en ces termes :
« - Si la fréquentation a augmenté cet été, en revanche la consommation a fortement baissé, environ 20%. Quand on fait l’analyse, deux principales causes émergent: les prix augmentent et le revenu disponible diminue ». Oui ! Messieurs « qu’on nomme grands » notre pouvoir d’achat chute. Vous n’avez pas l’air de vous en rendre compte mais la spirale infernale de la baisse des revenus, de l’augmentation des prélèvements et des prix commence à nous étouffer et accessoirement à nous « gonfler ». Mais, vous êtes excusables, en effet, il est très difficile de s’en rendre compte quand voiture, chauffeur, logement, nourriture, garde du corps et j’en passe sont payés par le contribuable et le salaire n’est quasiment que de l’argent de poche. Tous les professionnels du tourisme pourront d’ailleurs vous dire que cette année, nous avons eus des estivants français énervés irascibles et tendus.. Plus loin il poursuit par:« Même nous, les artisans et commerçants qui ne sommes pas payés pendant les grèves, commençons à avoir une furieuse envie de descendre dans la rue etc.»
La fin de l’édito est une diatribe contre toute la classe politique ajoutant que même les classes moyennes futures n’auront plus les moyens de se payer un logement et que le salut viendra des sans-grade et des anonymes en qui il fait confiance dans leur solidarité et leur humanisme …
Ben, il n’ y a pas que des bêtises là-dedans, ce d’autant qu'un ministre était en loisir dans les parages, mais pour toute réponse je lui répondrais qu’avec les CNE, fait pour les artisans et commerçants particulièrement, donc à priori lui, les sourires ne sont pas prêts de revenir et la consommation non plus !