ÉCONOMIE
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Pentecôte au travail : « Maudit Monday »
« Cette affaire est un bâton merdeux. Elle a été mal engagée depuis le début. On avait pas besoin de ça à moins de quinze jours du référendum ».
Je ne sais pas si le propos est exactement rapporté. C’est le Canard Enchaîné qui l’attribue à Jacques Chirac. Je confirme, s’il fallait apporter un témoignage, que les entreprises se seraient bien passées d’une telle disposition.
Je suis harcelé par les journalistes. Il y a ceux qui veulent connaître ma position par rapport au principe de l’impôt de solidarité et aux dispositions prévues par la loi. Et puis, il y a ceux, plus nombreux, qui préparent déjà leur rubrique conso du week-end 14-15 mai. Ils veulent faire le recensement des services ouverts ce jour là. Donc, de la liste des magasins accessibles aux consommateurs.
Aux premiers, je ne fais que répéter : l’idée d’envoyer à la négociation syndicats et patrons, pour que dans chaque entreprise, on décide « librement » du jour travaillé, est une idée proprement délirante. Forcément, il ne peut en résulter qu’une hétérogénéité de décisions. Avec, comme résultat, un sacré « foutoir ». Imaginez les conséquences sur les familles françaises, dont un membre du couple travaille ce jour-là, et l’autre pas, dont les enfants sont scolarisés et d’autres non. Chaque famille, chaque salarié a des raisons de se plaindre et de se révolter.
Passons brièvement sur les arguments irrecevables des cathos (le lundi de Pentecôte n’a aucune raison d’être une fête religieuse. C’est la raison pour laquelle Mgr Lustiger avait proposé cette date). Laissons de côté aussi les arguments des conservateurs qui refusent par avance toute recherche de flexibilité sur les horaires de travail. Constatons que l’argument prétexte de la contribution de solidarité est culpabilisante pour les salariés (une journée de travail sans rémunération !) et stigmatisante pour les bénéficiaires (au vu des remous suscités par cette affaire). A mon avis, une loi générale, applicable à tous, eût mieux valu pour l’harmonie des familles, comme pour l’activité économique, qu’une floraison hétérogène de décisions disparates.
Aux seconds, je suis bien incapable de répondre d’une manière uniforme.
Tenez, pas plus tard que ce matin, j’animais une réunion avec une trentaine de nos adhérents provinciaux. L’un, normand, qui parle plus fort que les autres, chauffait l’assistance : « Moi je ferme. On a décidé ça avec les délégués du personnel. Je ne vais quand même pas faire venir 400 employés, un lundi, le plus faible jour de chiffre d’affaires de la semaine, sans savoir si j’aurais des clients. Je préfère ne pas ouvrir le magasin, les salariés seront intégralement payés. Comme s’ils travaillaient. Ils ne perdront rien, je m’y suis engagé. J’acquitterai les cotisations patronales du jour. Après tout, l’Etat en paiera la moitié, puisque ce sont des charges déductibles ! »
A côté de lui, un autre l’interpelle : «Et tes concurrents que font-ils ?»
Réponse : « L’un sera ouvert… Mais déjà, un syndicat de fonctionnaires et une association familiale menacent de venir faire le piquet de grève. L’autre enseigne n’a pas encore pris sa décision, à dix jours de la date fatidique ! »
Je fais le tour de mes ouailles et fais les comptes. La moitié ouvrira son magasin. Ces adhérents ont pris langue avec leurs concurrents pour faire de même. Un quart des magasins ne recevra les consommateurs que le lundi matin (ils ne croient pas à un chiffre d’affaires suffisant pour tenir toute la journée). Enfin, un quart sera fermé : certains ont négocié (avec les délégués du personnel) l’ouverture de leur hyper un autre jour (le 11 novembre ou encore le vendredi de Pâques en Alsace). Les autres procèdent comme mon adhérent normand.
Voilà l’état des lieux. Pas de quoi pavoiser sur le plan des principes. Beaucoup de sarcasmes et d’irritation dans l’air. Tout le monde aurait compris, quitte à être de sa poche, qu’on en fasse une mesure symbole pour assouplir le carcan des 35 heures. Personne, absolument personne, ne croit fondé l’argument de la cotisation de solidarité…
Je vous raconterai la suite des évènements le 17 mai.
PS : Ah oui, j’oubliais. Moi, je travaille le lundi 16. Et vous ?
11 Commentaires
Mais comment financer ces mesures sans revenir sur la promesse de baisse des impôts ? Il faut inventer un truc qui mette en avant le côté solidaire de la démarche (c'est populaire la solidarité) sans donner l'impression de ponctionner les revenus (c'est moins populaire!). Alors voilà, on va tous faire un cadeau à nos aînés, on va travailler un jour gratuitement. Super idée! C’est le concept de la journée thématique. Après la fête des pères, la fête des mères, la fête des grands mère, halloween, le nouvel an chinois...voilà la journée pour les vieux!
Il a fallu 2 ans pour sortir ça !
Au moment des mouvements sociaux, des revendications sur le pouvoir d'achat, du référendum...C'était LE moment pour lancer cette super idée.Bravo Jean-Pierre,ça c'est du marketing politique!
N'aurait-il pas été plus simple, plus équitable et plus franchement solidaire et républicain d'en passer par l'intégration dans l'impôt ou la CGS ?
Les "bâtons merdeux" certains ont l'art de les faire passer d'autre de se les inventer.
mon centre e.leclerc sera fermé le lundi de pentcôte dans le respect de la vie privée de mes collaborateurs, cependant tous les salariés seront solidaires avec cette journée puisqu'ils devront effectuer 7 heures de travail en fonctions des besoins.
l'ouverture du lundi de pentcôte aurait créé dans notre entreprise une inégalité de solidarité, car le lundi seul 60% du personnel travaille.
bien à vous Mr Leclerc et continuons le combat pour la vie chère, ca c'est de la solidarité!!!
Juste remarque Bruno que dans une entreprise tout les salariés ne travaillent pas habituellement le "jour ferié en question" et donc que tout le monde ne sera pas solidaire! Cela veut dire qu'il y aura un jour de paie en moins pour certains et pas d'autre, ça augmente le sentiement d'injustice! Dire qu'il y a quelques semaines on parlait d'accorder le droit aux salariés de faire des heures supplémantaires rémunérés!
Moi aussi, Jid, j’ai pensé à créer une « RTT de direction ». Mais il faut bien assurer une permanence ce jour-là. Même si tous les magasins ne sont pas ouverts, il peut arriver un problème de sécurité, de qualité, exigeant une réaction rapide : une petite listeria, une salmonellose, un toit qui tombe sous l’effet d’une tempête, etc… Tous ces petits avatars qui font les angoisses du week-end, et qui sont l’ordinaire (sic) du métier de distributeur. Je serais donc au moulin !
Assurément, vous avez raison. Il eut été plus équitable d’augmenter la CSG. Mais, il eut fallu aussi un peu de courage politique… avant le référendum.
Moi aussi je travaille le Lunid de Pentecôte.
Mais je m'appercois que dés qu'il s'agit de solidarité, le fonctionnement est unidirectionnel :
- Pas de problèmes pour recevoir
- De gros problèmes pour donner.
Je ne dois pas avoir la bonne définition du mot social que les autres.
Pour ceux qui ne sont pas content des conditions de travail, aller en Pologne ou en Chine, on travaille plus pour un niveau de vie bien moindre.
Au fait la CSG n'aurait-elle pas augmentée ...
Moi aussi je travaille le Lunid de Pentecôte.
Mais je m'appercois que dés qu'il s'agit de solidarité, le fonctionnement est unidirectionnel :
- Pas de problèmes pour recevoir
- De gros problèmes pour donner.
Je ne dois pas avoir la bonne définition du mot social que les autres.
Pour ceux qui ne sont pas content des conditions de travail, allez en Pologne ou en Chine, on travaille plus pour un niveau de vie bien moindre.
Au fait la CSG n'aurait-elle pas augmentée ...
Sur le fond, je vous donne raison. Le problème, c’est que pour beaucoup de Français, cette histoire de solidarité n’a été qu’une couverture, une caution, pour grappiller quelques heures de travail. D’ailleurs, la solidarité ne pouvait-elle s’exprimer par la hausse de la CSG. N’aurait-ce pas été plus équitable, plutôt que de taxer les seuls salariés ?
Les 495 adhérents du Mouvement E. Leclerc sont des entrepreneurs, indépendants, propriétaires de leur magasin E. Leclerc. Devenir adhérent, c'est adhérer aux 3 grands principes du Mouvement (indépendance, solidarité et défense du consommateur) et s'impliquer dans sa gestion coopérative au quotidien.
Bonjour Michel Edouard Leclerc
j'étais , il y a quinze jours environ à la réunion perspective, et je vous ai bien écouté comme chaque année depuis 10 ans maintenant.
Ce que j'ai retenu cette année c'est votre inquiétude face au changement de mentalité dans le mouvement de votre père, en effet et vous avez raison il faut redevenir LECLERC.
Cependant vous n'avez pas parlé des raisons qui ont fait que le mouvement s'est embourgeoisé, qu'il est moins réactif, moins à l'attaque.
Mais nous salarié(je suis salarié), nous connaissons le mal qui frappe à votre porte le non renouvellement de votre flotte, en effet l'indépendance est devenu une tarre, l'argent le seul but, et le trésor doit être gardé dans sa tribu coute que coute.
Les jeunes cadres dynamiques qui avaient leurs chances de devenir LECLERC (adhérent) sont oubliés au profit des fils de bonne famille. Mais ils n'ont pas connu la difficulté, ni comment gagner quand on a jamais perdu.
Alors Monsieur Leclerc, faite quelque chose, redonnez à ce qui le mérite la possibilité de porter eux aussi les couleurs de votre bannière et de représenter fièrement l'enseigne LECLERC comme elle se doit d'être.
merci de répondre...