Le e-commerce, la concurrence et les prix
ÉCONOMIE Enjeux de la distribution

Le e-commerce, la concurrence et les prix

Je ne peux évidemment qu’être solidaire des commerçants et industriels, petits ou grands, concurrencés par des sites Internet qui ne respecteraient pas la législation, les normes sociales et environnementales, ni la fiscalité française.

Une telle pratique serait en droit, discriminatoire, anti-concurrentielle, et préjudiciable à tout le tissu économique français – aux entreprises et à l’emploi. Mais dans ce qu’on appelle les "affaires Shein / BHV / Pimkie" et "Temu / La Poste", je suis très perplexe à la fois sur le timing et la méthode des pouvoirs publics.

1) Interdire ou contrôler ?

Shein est présent en France depuis 7 ans, et affiche plusieurs millions de clients. La marque est devenue le 5ème site textile français, juste avant Temu. Outre que ça dit beaucoup de choses sur le pouvoir d’achat des français, de plus en plus nombreux à se tourner vers des petits prix, on s’étonne qu’il fallût l’opération BHV pour multiplier contrôles et déclarations guerrières.

Je ne sais pas si ces phrases ont vraiment été prononcées par des ministres, mais s’il est vrai "que 87% des annonces de réduction prix sur ces sites seraient trompeuses", et "huit articles sur dix non-conformes", que n’a-t-on pas déjà procédé au retrait des produits ?

Toutes les fédérations de commerçants (FCD, Alliance du commerce…) ont formulé des griefs concernant la faiblesse ou l’inexistence des droits de douane, la dangerosité de certains produits (comme les jouets). Et surtout l’inapplication de normes, qui expliquerait une politique artificielle de prix bas, avec impossibilité de s’y aligner pour les marques implantées en France.

Mais en tant que commerçant, je ne serai personnellement jamais à l’aise avec l’idée de demander d’interdire mon concurrent. Il appartient donc aux pouvoirs publics, qui disposent de l’autorité et des capacités d’investigation, de répondre à ces griefs : droits de douane, application des normes, retrait des produits délictueux (comme sait le faire la direction des fraudes dans les magasins français).

2) D’un point de vue professionnel, et au-delà des contentieux, il faut savoir anticiper et réagir à une nouvelle étape commerciale.

Les grandes marques du textile et du non-alimentaire françaises s’approvisionnaient déjà dans les mêmes usines ou dans les mêmes pays que ces plateformes. Comment ne pas voir derrière l’arrivée de Shein, Temu, JD et consorts, une désintermédiation de la fonction commerciale.

Le numérique et la technologie permettent aux industriels de vendre directement aux consommateurs, jusque sur les réseaux sociaux. Même si la remise en conformité des pratiques contestées augmente les coûts des plateformes, elles resteront les moins chères si nous ne nous bougeons pas.

Amazon a révolutionné la logistique. Alibaba, EBay, Rakuten, ont créé des places de marché. Shein et consorts proposent des circuits courts, grandes marques direct aux consommateurs, sur le Net.

Je soutiens les actions de mes collègues de la FCD, de l’Alliance du Commerce, et de nombreux autres commerçants français, pour faire appliquer notre droit social et environnemental. Il faut l’obtenir.

Il n’empêche, c’est une révolution technologique. Pas plus Astérix et Obélix n'ont empêché les Romains d’envahir la Gaule, pas plus les barrières normatives ne suffiront pour empêcher la diversité et l’efficacité du e-commerce.

L’avenir du commerce français va maintenant dépendre de notre capacité à nous adapter à une "révolution multicanale". Nous avons eu tous les 10 ou 15 ans ce type de défis à relever : l’hypermarché, le hard-discount, les magasins spécialisés, le e-commerce... Et maintenant, de nouvelles plateformes.

Si on se réfère à l’histoire du commerce français, la contre-offensive est à notre portée. E.Leclerc veut relever les défis, et trouver les moyens de rester le moins cher en respectant les demandes sociales et environnementales.

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